Politique environnementale
Dans son avis du 5 décembre sur le projet de règlement grand-ducal portant notamment reconduction d’une aide financière pour la promotion des voitures à faible émission de CO2 (prime CAR-e), la Chambre de Commerce plaide pour une abolition de la politique de subventionnement actuelle au profit d’une politique plus efficace et moins onéreuse décourageant davantage des comportements d’achat dommageables d’un point de vue environnemental.
La Chambre de Commerce estime dans son avis qu’afin de pouvoir réaliser les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) de manière efficace, le fait de subventionner massivement, et sur un horizon de temps conséquent, certains produits qui, pourtant, sont dotés d’un standard écologique élevé, ne véhicule guère les bons messages au consommateur. Ce dernier fait ses choix notamment en fonction du prix et il suffit parfois qu’un subside soit suspendu, pour que le choix du consommateur se porte vers un autre produit peut-être moins onéreux, mais aussi moins éco-compatible. Les subventions créent un différentiel de prix artificiel, faussent la concurrence et provoquent une distorsion dans les comportements d’achat.
Prime CAR-e et baisse des émissions : une relation de cause à effet ?
La déclaration des auteurs du projet de règlement grand-ducal, selon laquelle la baisse sensible de 13,1% entre 2007 et 2011 des émissions de CO2 moyennes des voitures neuves serait à attribuer au succès de la prime CAR-e, est mise en question par la Chambre de Commerce, qui met en garde contre toute conclusion hâtive quant aux facteurs expliquant une baisse des émissions des voitures nouvellement immatriculées. En effet, le dispositif de la prime CAR-e n’est pas le principal ou l’unique élément à prendre en compte. Il faut également considérer le progrès technologique exogène, la hausse des prix des carburants ou encore l’éco-responsabilisation des consommateurs. Ainsi, l’exercice qui consiste à vouloir déterminer le bénéfice incrémentiel de la prime CAR-e sur l’évolution des émissions de GES est pour le moins délicat, sinon hasardeux.
Entre 2007 et 2011, le dispositif de la prime CAR-e s’est traduit par un coût budgétaire à charge de l’Etat de l’ordre de 17,42 millions EUR (primes CAR-e et CAR-e plus). En prenant en compte les demandes restant à traiter, le coût total pourrait atteindre les 44,5 millions EUR, soit une dépense conséquente dans le contexte déficitaire actuel du budget de l’Etat. Aussi, la Chambre de Commerce estime qu’à court terme, la prime CAR-e doit être adaptée à l’évolution technologique, comme ceci a été le cas par le passé, et s’interroge s’il ne conviendrait pas d’abandonner progressivement une politique de subventionnement systématique, au profit d’une politique décourageant davantage des comportements d’achat sous-optimaux d’un point de vue environnemental.
Encourager le comportement éco-responsable par une fiscalité verte repensée
La Chambre de Commerce rappelle que tout régime de subvention doit s’inscrire dans une approche d’incitation à court terme. L’intervention de l’Etat ne doit donc pas se prolonger à moyen, voire à long terme, car le mécanisme de formation des prix s’en trouverait faussé et les comportements d’achat, biaisés. Une politique pertinente et bien moins onéreuse, serait de convaincre le consommateur qu’un comportement éco-responsable constitue la norme, plutôt qu’une acquisition basée sur un prix subventionné.
Selon la chambre professionnelle, un autre recours à la fiscalité verte, au-delà du seul subventionnement, s’impose, afin d’encourager les comportements vertueux sur le plan environnemental. Il pourrait, par exemple, s’avérer utile d’introduire des valeurs limites pour des produits ou des technologies correspondant à un standard écologique élevé, défini au préalable sur base d’une analyse comparative au niveau international et en concertation avec les opérateurs économiques concernés. Par un effort d’information et de sensibilisation, le choix des consommateurs doit être dirigé vers les produits au service de l’environnement. Ces produits doivent permettre de réduire la facture énergétique d’une part, et modifier les pratiques ayant un impact sur l’environnement d’autre part. Si le consommateur n’adoptait pas ce choix de référence, il pourrait, le cas échéant, être tenu de s’acquitter d’un malus fiscal. Il s’agit donc d’un changement de paradigme par rapport à la politique actuelle de subsides, qui offre, certes, des résultats en termes de changement de comportement des consommateurs, mais qui comporte un coût budgétaire exorbitant.
D’après la Chambre de Commerce, il faudrait réaliser, dans les meilleurs délais, un inventaire de l’ensemble des subsides et aides existant en matière environnementale, afin de permettre aux décideurs politiques de conclure si les aides financières en question remplissent leurs objectifs et si, le cas échéant, d’autres outils, tels que la standardisation ou le malus fiscal, ne seraient pas davantage aptes à conduire à des résultats comparables en matière d’ «éco-compatibilité », tout en faisant baisser le coût afférent à charge du budget de l’Etat.
En ce qui concerne les aides sur les réfrigérateurs, la Chambre de Commerce salue que ce dispositif contraire à une politique budgétaire avisée, soit abandonné. En effet, avec un coût de quelque 140 EUR pour une économie d’1 MWh en matière de consommation d’énergie finale, le coût du dispositif dépasse, par exemple, de 7 à 14 fois le coût budgétaire des mesures dans le domaine de la promotion de l’assainissement énergétique des bâtiments ou encore de la promotion des constructions nouvelles à basse consommation d’énergie.
Finalement, la Chambre de Commerce estime dans on avis que le subventionnement envisagé par le Gouvernement en matière de quadricycles électriques relève plus d’une dérive anecdotique que d’une politique environnementale pertinente. En effet, les auteurs du projet de règlement grand-ducal tablent sur l’immatriculation de 75 véhicules de ce type en 2012. Considérant leur prix d’acquisition élevé, une aide de 1.000 EUR aura selon la Chambre de Commerce comme conséquence un effet social pervers, étant donné que le nombre réduit de consommateurs fortunés pouvant se permettre l’acquisition d’un tel véhicule ne fera pas forcément son choix en fonction de la disponibilité d’une aide publique.