La Chambre de Commerce propose l’introduction d’une s.à r.l. simplifiée pour soutenir la croissance

Affaires économiques

Actualité&Tendances n°8

Pierre Gramegna, directeur général de la Chambre de Commerce, entouré de Anne-Sophie Theissen du Département Avis et Affaires juridiques et de Gérard Eischen, membre du comité de direction et chef du Département Création et développement des entr

Dans son huitième bulletin économique « Actualité & Tendances », la Chambre de Commerce réfléchit à la manière de dynamiser la création d'entreprises au Luxembourg et propose l’introduction d'un nouveau type de société, la société à responsabilité limitée simplifiée. Cette nouvelle forme de société serait un grand pas en avant en matière de simplification administrative et constituerait un instrument apte à soutenir efficacement la croissance économique du pays.

Dans son mot d’introduction, Pierre Gramegna, directeur général de la Chambre de Commerce, a d’emblée posé l’environnement économique d’après-crise, qui reste fortement marqué par un potentiel de croissance réduit, comme cadre de la proposition d’introduire une s.à r.l. simplifiée au Grand-Duché. Ce nouveau type de société permettrait, en effet, non seulement de contribuer à la réduction du chômage en favorisant l’indépendance, mais répondrait également aux spécificités de l’économie des services et du secteur TIC. « La s.à r.l. simplifiée serait un instrument supplémentaire pour la diversification de l’économie luxembourgeoise, qui peut se faire en attirant au Luxembourg des grandes entreprises étrangères, mais qui peut également se faire en facilitant et en accélérant la constitution de PME », a expliqué Pierre Gramegna. « Notre pays a un problème au niveau de la facilité à créer une entreprise, ce qui lui a d’ailleurs valu d’être relégué à la 77e place dans le hit-parade établi par la Banque mondiale en matière de ‘ease of business’. C’est une situation qui n’est pas tenable pour le Grand-Duché, d’autant plus que tous nos voisins immédiats ont déjà réagi en introduisant chez eux divers types de s.à r.l. simplifiée. Nous souhaitons que le Luxembourg rattrape son retard. C’est aussi une question de compétitivité.»

Gérard Eischen, membre du comité direction de la Chambre de Commerce et responsable de son guichet « Espace Entreprises », a ensuite précisé que l’introduction d’une s.à r.l. simplifiée cadre parfaitement avec les objectifs définis par la Commission européenne dans le « Small Business Act », qui invite les Etats membres à adapter leurs cadres réglementaires aux réalités d’une économie du 21e siècle basée sur le transfert de connaissances et qui préconise une réduction des délais en matière de création d’entreprises.

La Chambre de Commerce rappelle que, selon la définition de la Commission européenne, l’entrepreneur est le porteur de « l’esprit d’entreprise (lequel) désigne un état d’esprit, ainsi que le processus de création et de développement de l’activité économique par la combinaison de la prise de risque, de la créativité et/ou de l’innovation et d’une saine gestion, dans une organisation nouvelle ou existante [1]».

De nos jours vient s’ajouter à cette définition un élément d’insertion sociale en ce sens que l’entrepreneur crée d’abord son propre emploi. Cet entrepreneur n’est plus nécessairement l’auteur de hauts-faits majeurs, mais plutôt le champion de la proximité. Cet entrepreneur revient en quelque sorte aux « sources » de l’entrepreneuriat du fait qu’il essaie de marier risque et innovation tout en tenant les rênes de « son » entreprise.

A en juger par la démographie positive des entreprises installées sur le territoire luxembourgeois, sans oublier le nombre toujours croissant de prestataires transfrontaliers, l’entrepreneuriat au Luxembourg connaît apparemment une évolution assez dynamique. Cette réalité se traduit par le fait que trois quarts des entreprises sont créées par des étrangers malgré le cadre réglementaire au Luxembourg assez rigide qui ne se distingue pas par sa simplicité.

Un porteur de projet qui prévoit de s’établir au Luxembourg doit, en principe, d’abord se munir d’une autorisation d’établissement, qui lui est octroyée par le ministre des Classes moyennes sur base d’une demande écrite après une instruction administrative, en considération d’une qualification professionnelle, d’une honorabilité particulière, de l’existence d’un établissement stable et approprié, sans oublier – pour certaines activités – des garanties de nature financière ou autre, et ceci uniquement pour l’accès à la profession !

Le Luxembourg en retard pour la vitesse de création

Ne devrait-on pas emboîter le pas à nos voisins qui essaient depuis un certain temps de moderniser certains instruments, mis à disposition de ceux qui souhaitent se lancer dans l'indépendance ? La réponse à cette question ne peut être qu’un oui franc et massif. Encore faut-il analyser quel instrument serait approprié à notre pays. Pour les besoins de sa nouvelle étude, la Chambre de Commerce a analysé les innovations introduites récemment par ses trois pays voisins et conclut que le système de l’auto-preneur français correspond peu au tissu économique luxembourgeois.

En revanche, le Grand-Duché de Luxembourg devrait instaurer une s.à r.l. simplifiée et s’inspirer de la SPRL-S belge et de la « Mini-GmbH » allemande.

La s.à r.l. simplifiée luxembourgeoise devrait ainsi pouvoir être créée avec un capital symbolique d’un EUR.

En outre, le capital social de la s.à r.l. simplifiée devrait atteindre le montant du capital d’une s.à r.l. classique (12.500 EUR) dans un délai maximal de cinq années à dater de sa constitution, période pendant laquelle elle serait obligée de capitaliser 25% de ses résultats. En ce qui concerne le délai de cinq années, celui-ci pourrait être retenu – dans la mesure où il correspond à la moyenne européenne en termes de date butoir – pour déterminer la viabilité d’une société.

Dans le cadre d’une simplification administrative, il s’agira bien entendu également de supprimer l’exigence de l’acte authentique devant notaire.

Ainsi, le formalisme de constitution devrait être allégé sur base d’un jeu de statuts-types simplifié, disponible en ligne, imposé par voie législative, et sur base duquel le futur entrepreneur ferait son choix. Ce choix pourrait se faire via une déclaration, auprès, par exemple, du Registre de Commerce et des Sociétés (RCS-L), soit électroniquement, en sélectionnant l’une des différentes options proposées dans le formulaire en ligne de statuts-types, soit en personne, moyennant le remplissage du formulaire papier en question, directement auprès du RCS-L. Puisque le registre s’occupe déjà, à l’heure actuelle, des formalités d’enregistrement, les deux hypothèses équivaudraient à une inscription au RCS-L.

En ce qui concerne la gestion de la s.à r.l. simplifiée, celle-ci ne devrait incomber qu’à une ou plusieurs personnes physiques. Il en va de même en ce qui concerne la qualité des associés. Par ailleurs, ceux-ci ne devraient être autorisés qu’à détenir des parts dans une seule et unique s.à r.l. simplifiée. Il est, en outre, proposé que les associés soient, avant constitution du capital de la s.à r.l. simplifiée, tenus solidairement à concurrence du capital social minimal de 12.394,68 EUR prévu pour les s.à r.l. « classiques ».

Si la s.à r.l. simplifiée n’atteignait pas ce capital dans le délai imparti, il y aurait lieu d’impartir un délai unique de 6 mois au(x) fondateur(s) pour compléter le capital à due concurrence, à défaut de quoi, le tribunal d’arrondissement pourrait prononcer la dissolution et ordonner la liquidation de la société.

Le tableau suivant reprend les principales caractéristiques de la proposition d’une s.à r.l. simplifiée.

Principales caractéristiques de la proposition d'une s.à r.l. simplifiée pour le GDL

Capital minimum souscrit et libéré

1€ (déclaration sur l'honneur)

Capital à atteindre

12.500€ sur 5 ans

Capitalisation obligatoire des bénéfices

25%

Statuts

Recours à des statuts-types

Forme

Sous seing privé ou par acte authentique, au choix

Inscription

En ligne ou en personne au RCS-L

Gérance

Personne physique (une ou plusieurs)

Associés

Personne physique (une ou plusieurs)

Nombre de SARL simplifiées par créateur

1

Transformation en SARL de droit commun

Purement facultatif

Sanction en cas de faillite avt. constitution du capital

Associé(s) tenu(s) solidairement > 12.500 €

Sanction en cas de non-consitution du capital

Liquidation judiciaire (art.203 loi 1915)

Délai de constitution

24 heures

La création d’entreprise simplifiée devrait permettre d’insuffler une dynamique nouvelle à l’économie luxembourgeoise générant ainsi de la croissance et de l'emploi. Cette simplification devrait également rendre le Luxembourg plus attractif aux yeux des porteurs de projets, de l’extérieur.


[1] Green Paper on European Entrepreneurship, 2003, p.6