Spécialisée dans les services aux banques qui en sont les seuls clients, Clearstream est, avec Euroclear, l'un des deux organismes européens de règlement-livraison. Clearstream a des filiales dans onze pays et compte aujourd'hui 2500 clients répartis dans 110 pays à travers le monde.
Institué par un consortium de banques principalement européennes Clearstream a vu le jour en 1970 sous le nom de Cedel. Cedel est alors spécialisé dans le règlement livraison des euro-obligations (eurobonds). En janvier 2000, naît Clearstream, issu de la fusion de Cedel International avec Deutsche Börse Clearing, une filiale de Deutsche Börse Group. En juillet 2002, Deutsche Börse achète les 50 % restants de Clearstream International, qui en devient une filiale à 100%. Clearstream est un ICSD, International Central Securities Depository, ou Dépositaire Central International. Son métier est le règlement livraison sur le marché des eurobonds, ainsi que le règlement livraison des titres et parts de fonds d'investissement. Les clients de Clearstream sont des banques ou des institutions financières (aucun particulier ne peut ouvrir de compte chez Clearstream), qui ouvrent un compte par lequel seront réglées/livrées leurs transactions.
Rencontre avec Philippe Seyll, CEO de la société.
Quels sont les projets sur lesquels vous travaillez actuellement ?
Je ne peux pas tous les citer, nous en avons beaucoup. Nous travaillons notamment à la mise en conformité avec les règlements émis par les différents organismes en charge de leur mise en place, CSSF, FMI... Puis, nous travaillons au bon fonctionnement du système T2S (Target2Security). Les économies modernes s'appuyant sur des flux de transactions qui se veulent sûrs et efficaces, il est nécessaire que les systèmes de paiement fournissent l'infrastructure qui permet de faire circuler l'argent et les titres (actions et obligations) dans l'économie. T2S est un système de paiement et d'échanges de titres utilisé par les banques de l'Union européenne pour transférer des fonds et des titres entre elles en temps réel, harmonieusement et efficacement. Il permet de maintenir la stabilité financière dans la zone euro. C'est un élément clé de l'intégration financière au sein de l'Union et nous veillons, en collaboration avec la Banque Centrale Européenne, à ce qu'il soit constamment opérationnel pour que la libre circulation des flux de monnaie et de titres transfrontaliers puisse s'effectuer sans problème. Enfin, nous menons également plusieurs projets en lien avec les FinTech et les technologies de stockage et de transmission d'informations, transparente et sécurisée, autrement dit les blockchains. Là encore, pour ne citer qu'un de ces projets, nous avons investi dans HQLAX, une startup luxembourgeoise qui offre une solution innovante pour améliorer et promouvoir la stabilité et la fluidité des échanges sur les marchés financiers.
Quelle est la réalisation dont vous êtes le plus fier ?
Nous sommes une société commerciale et en tant que telle, pour nous, gagner des mandats internationaux, qui nous permettent de déployer nos activités au niveau mondial, est une réelle fierté car cela nous permet d'afficher une croissance annuelle de 10%.
Quels sont les grands défis auxquels vous devez faire face dans votre secteur d'activité ?
Les obligations réglementaires imposées aux secteurs de la banque et de la finance se sont considérablement accrues depuis une dizaine d'années. Si cette régulation est nécessaire, elle impose de nombreuses contraintes aux entreprises et les obligent à consentir de lourds investissements en termes humains et financiers, c'est un défi de chaque jour. Je pense que certaines réglementations gagneraient à être élaborées selon une approche plus concertée avec les acteurs du secteur. Un autre grand défi vient de l'émergence des FinTech qui évoluent très vite et nous obligent à veiller à être constamment réactifs, à réinventer nos métiers. La banque d'aujourd'hui n'a plus grand-chose en commun avec celle d'il n'y a encore que 5 ans. Si les FinTech créent une émulation dans le secteur bancaire, cette évolution est un gros défi pour des acteurs plus " traditionnels " qui par essence, peuvent réagir moins rapidement. Puis, mais c'est plus général, je pense que le plus gros défi du pays dans les prochaines années sera celui de la mobilité. Si des solutions ne sont pas trouvées et mises en place rapidement, cela posera un très gros problème au pays et nécessairement impactera négativement tous les secteurs économiques, notamment car le Luxembourg va y perdre en attractivité pour les talents. Je pense que les autorités luxembourgeoises et la Chambre de Commerce s'y attèlent et j'ai confiance en leur capacité d'innovation.
Si vous pouviez changer une chose dans votre secteur d'activité, quelle serait-elle ? Que pourrait faire la Chambre de Commerce en ce sens ?
Ce serait dans un premier temps, de la part des régulateurs des marchés, de mieux coordonner la mise en place de toutes les règlementations imposées aux organismes financiers ces dernières années et pour certaines d'en expliciter plus clairement quel en est l'intérêt, quels en sont les nouveaux enjeux pour la société et l'économie. Puis, mais c'est plutôt un vœu qu'une chose à changer, je souhaite vraiment que les pouvoirs publics restent proches des entreprises. La proximité que nous avons ici avec les ministères et les administrations est un exemple de réussite et permet de régler tellement de problèmes rapidement par rapport à d'autres pays qu'il serait vraiment dommage de la perdre...
Texte: Corinne Briault - Photos: Pierre Guersing