Avis de la Chambre de Commerce
La Chambre de Commerce a rendu son avis sur le projet de loi visant à doter le Luxembourg d’un cadre législatif régissant les procédures à appliquer aux avoirs en comptes et coffres forts dits « dormants » ou « inactifs » et aux avoirs placés sous contrats d’assurance-vie tombés en déshérence.
L’objectif du projet de loi vise d’une part, à renforcer la sécurité juridique pour les banques et assureurs en précisant leurs obligations professionnelles, et d’autre part, à renforcer la protection des titulaires et ayants droit de certaines prestations d’assurance en instaurant des dispositions relatives à la recherche de leurs comptes, coffres-forts et contrats d’assurance. Le cadre légal est censé répondre aux attentes des clients des banques et entreprises d’assurance à l’égard d’une place financière internationale moderne et ouverte.
Un projet de loi perfectible à plusieurs égards
Si l’Institution accueille favorablement le projet dans son principe et ses objectifs, elle émet néanmoins quelques réserves assorties de recommandations.
Ainsi, la Chambre de Commerce salue l’objectif de vouloir favoriser la restitution des avoirs aux titulaires de comptes ou à leurs ayants droit en encourageant la surveillance des comptes inactifs et la recherche des titulaires. Elle accueille également favorablement la proposition d’affecter 50% des avoirs non réclamés par les ayants droit au Fonds souverain intergénérationnel du Luxembourg (FSIL), une initiative qui a pour finalité de fortifier l’épargne pour les générations futures.
En revanche, la Chambre de Commerce estime que le projet passe, à plusieurs égards, à côté de l’objectif de sécurité juridique voulu par et pour les banques et les assurances et renferme une complexité dont les coûts de mise en œuvre, notamment informatiques, seront particulièrement élevés.
Les trois pierres d’achoppement du nouveau cadre législatif
Les trois principales critiques émises par la Chambre de Commerce portent sur l’accord préalable de la caisse de consignation et les informations à fournir, les différents délais et enfin, les sanctions administratives et pénales.
Concernant l’accord préalable de la caisse de consignation, dans la mesure où la consignation est devenue obligatoire, cet accord devrait être donné dès qu’il est avéré que la banque ou l’assureur ne peut plus restituer ces avoirs au titulaire ou ses ayants droit. Il est indispensable, une fois les diligences accomplies, de permettre la consignation des avoirs inactifs en vue d’assurer un reporting satisfaisant dans le cadre des obligations FATCA (Foreign Account Tax Compliance Act) et CRS (Common Reporting Standard). Cette consignation ne doit d’ailleurs s’accompagner que d’un nombre restreint d’informations à fournir à la caisse, dont ne font certainement pas partie la confirmation que ces avoirs ne proviennent pas d’une opération de blanchiment. Si la possibilité de refus de la caisse de consignation devait être maintenue, la décision devra être motivée et intervenir endéans les trois mois, le silence ne suffisant pas.
S’agissant des délais, le projet de loi renferme une multitude de délais divers et variés en termes de longueur et de point de départ. Il instaure trois régimes distincts pour les comptes, les coffres-forts et les contrats d’assurance. Si le texte prévoit des dérogations et un alignement des délais lorsque le titulaire dispose à la fois d’un coffre et d’un compte auprès du même établissement, il n’harmonise pas totalement les délais de traitement. Par ailleurs, plusieurs établissements sont à la fois banquiers et assureurs, de sorte qu’ils devraient mettre en œuvre simultanément ces trois régimes et effectuer des développements informatiques distincts. A noter encore que le projet de loi renferme un délai de conservation des données par les banques, qui semble incompatible avec le RGPD (Règlement Général sur la Protection des Données).
En dernier lieu, Chambre de Commerce déplore les lourdes sanctions, administratives et pénales qui ne semblent même plus requérir d’élément moral pour être prononcées. Des remarques plus spécifiques relatives à la présomption d’exigibilité des prestations peuvent être formulées pour les assurances.
A titre plus ponctuel, la Chambre de Commerce demande de préciser le sort de certains comptes dits « omnibus » et d’exclure les mineurs de la définition des titulaires pour éviter que des comptes ouverts au seul bénéfice de titulaires mineurs soient considérés comme inactifs. La Chambre suggère, par ailleurs d’augmenter la fourchette disponible pour les frais de recherche. Elle souhaiterait également que les documents requis par les différentes annexes puissent être fournis au minimum en anglais et que soit précisé à qui incomberait la charge des éventuels frais de traduction.
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