News flash : Développements récents en matière de blanchiment

Affaires Juridiques

La Chambre de Commerce porte à votre attention l’entrée en vigueur, le 18 février 2018, de la loi du 13 février 2018 portant transposition des dispositions ayant trait aux obligations professionnelles et aux pouvoirs des autorités de contrôle en matière de lutte contre le blanchiment et contre le financement du terrorisme de la directive (UE) 2015/849 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015 relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme, modifiant le règlement (UE) n° 648/2012 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 2005/60/CE du Parlement européen et du Conseil et la directive 2006/70/CE de la Commission et modifiant de nombreuses lois dont notamment la loi modifiée du 12 novembre 2004 relative à la lutte contre le blanchiment et contre le financement du terrorisme (ci-après la « Loi LCB/FT 2018 »).

La Chambre de Commerce souhaite attirer l’attention de ses ressortissants sur les changements majeurs que la Loi LCB/FT 2018 apporte au dispositif existant de lutte contre le blanchiment et contre le financement du terrorisme sans pour autant présenter les changements introduits par la nouvelle réglementation de manière exhaustive.

Ainsi, il y a lieu d’observer des changements au niveau (i) des définitions et de la désignation des autorités de contrôle et organisme d’autorégulation, (ii) des obligations professionnelles et (iii) de la surveillance et des sanctions.

I. Nouvelles définitions et désignations
La Loi LCB/FT 2018 introduit tout d’abord des nouvelles définitions telles que, par exemple le concept d’ « établissement financier », et elle en modifie d’autres.

La Chambre de Commerce souhaite plus particulièrement attirer l’attention sur l’adaptation des définitions de « bénéficiaire effectif » qui apporte plus de précisions quant à la désignation de la personne physique étant le bénéficiaire effectif d’une structure et de « personnes politiquement exposées » qui intègre désormais non seulement les membres directs de leur famille mais également leurs frères et sœurs.

Ensuite, la nouvelle réglementation désigne les autorités de contrôle et organismes d’autorégulation luxembourgeois chargés de veiller au respect par les professionnels de leurs obligations professionnelles en matière de lutte contre le blanchiment et contre le financement du terrorisme. Ainsi, l’Administration de l’enregistrement et des domaines se voit attribuer les pouvoirs de surveillance et de contrôle sur tous les professionnels qui ne sont pas surveillés par la Commission de surveillance du secteur financier, par le Commissariat aux assurances ou par les organismes d’autorégulation (organismes qui représentent les membres d’une profession tel que par exemple l’Institut des réviseurs d’entreprises).

II. Obligations professionnelles faces aux risques
La Loi LCB/FT 2018 s’inscrit davantage dans le raisonnement d’une approche basée sur les risques qui impose aux professionnels d’adapter le niveau de vigilance en fonction des risques identifiés.

Ainsi, la nouvelle réglementation prévoit, d’un côté, une obligation d’identification et d’évaluation des risques et, d’un autre côté, une obligation de prendre des mesures appropriées pour gérer et atténuer ces risques.

Il est également requis que chaque professionnel détermine l’étendue des mesures de vigilance à appliquer à l’égard de la clientèle et ce, en fonction de son appréciation de risque en prenant en considération au minimum les variables énoncées dans l’annexe II de la Loi LCB/FT 2018.

Il convient encore de noter que les négociants des biens sont dorénavant obligés d’appliquer les mesures de vigilance à l’égard de leur clientèle lorsqu’ils exécutent des transactions en espèces d’un montant égal ou supérieur à 10.000 euros (ce seuil était préalablement de 15.000 euros).

L’un des changement des plus importants apportés par la nouvelle législation consiste en la suppression de l’énumération des situations dans lesquelles le professionnel pouvait appliquer des mesures de vigilance simplifiées à la relation d’affaires ainsi que dans la modification des situations dans lesquelles le professionnel doit appliquer des mesures de vigilance renforcées à la relation d’affaires. En effet, le professionnel devra désormais s’assurer, avant d’appliquer les mesures de vigilance simplifiées ou renforcées et au minimum sur base des facteurs de risques prévus dans les annexes III et IV de la Loi LCB/FT 2018, que la relation d’affaires présente un degré de risque plus ou moins élevé.   

Finalement, la nouvelle législation apporte les changements concernant les exigences relatives à l’organisation interne des professionnels. Ces derniers doivent notamment mettre en place les politiques, contrôles et procédures efficaces et proportionnées afin d’atténuer et de gérer les risques de blanchiment et de financement du terrorisme ainsi que les mesures de sensibilisation et de formation du personnel.

III. Surveillance et sanctions
Le nouveau dispositif renforce aussi les pouvoirs de surveillance et les mesures de sanctions des autorités de contrôle, en prévoyant notamment, conformément à des critères prédéfinis, un arsenal de sanctions et mesures administratives en cas de non-respect des obligations professionnelles. Les sanctions et mesures administratives vont du simple avertissement à l’amende administrative dont le montant maximal infligé aux professionnels peut atteindre deux fois le montant de l’avantage tiré de la violation ou 1.000.000 euros, et incluent également la possibilité de retrait d’agrément ou de l’autorisation d’établissement. L’amende maximale pouvant être infligée spécifiquement aux établissements de crédit et aux établissements financiers peut s’élever, quant à elle pour les personnes morales jusqu’à 5.000.000 d’euros ou à 10 % du chiffre d’affaires annuel total, et jusqu’à 5.000.000 d’euros pour les personnes physiques. Des sanctions non financières sont également prévues, telles qu’une déclaration publique quant à l’identité du contrevenant ou un retrait/suspension d’agrément.

Par ailleurs, il convient de souligner qu’en principe, ces sanctions et mesures administratives seront publiées sur le site internet de l'autorité ayant pris la mesure. 

Quant au montant des amendes infligées au titre de sanctions pénales, ce dernier a également été revu à la hausse et peut dorénavant varier entre 12.500 et 5.000.000 euros.

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La Chambre de Commerce souhaite encore rappeler que la Loi LCB/FT 2018 ne transpose qu’une partie de la directive (UE) 2015/849 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015 relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme.

En effet, la loi du 23 décembre 2016 issue du projet de loi n°7020 appelée également la « réforme fiscale 2017 » a ajouté à la liste des infractions primaires de blanchiment et du financement du terrorisme[1] la fraude fiscale aggravée ou caractérisée, inexistante jusqu’alors dans l’article 506 du Code pénal, qui ne prévoyait que la fraude fiscale simple ou l’escroquerie fiscale.

Finalement, les projets de loi n°7216 et n°7217, actuellement en cours d’adoption, transposeront les articles 30 et 31 de la directive 2015/849 précitée afin d’instituer, d’un côté, un registre des bénéficiaires effectifs de structures principalement sociétaires et, d’un autre côté, un registre des fiducies qui génèrent des conséquences fiscales.


[1] Pour donner lieu au blanchiment, il faut à la base un fait sanctionnable, soit une infraction dite « primaire », par rapport au blanchiment qui, lui, n’est que secondaire. Si les cas d’incriminations primaires étaient jusqu’alors réservés à des crimes graves comme par exemple le financement du terrorisme, le trafic d’armes ou de drogue, la directive 2015/849 précitée vient y ajouter la fraude fiscale aggravée ou caractérisée.