Avis de la Chambre de Commerce
La Chambre de Commerce vient d’aviser le projet de loi portant réforme du congé parental qui introduit de nouvelles formes de congé parental plus flexibles ainsi que des modalités financières plus attractives. La Chambre de Commerce est d’accord avec les objectifs essentiellement familiaux de la réforme, qui visent à favoriser la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle et à augmenter le nombre de parents qui y ont recours, mais demande néanmoins que les modalités pratiques de cette réforme soient compatibles avec l’intérêt économique général de ses ressortissants.
Une réforme consentie par les employeurs en contrepartie de la flexibilisation de l’organisation du temps de travail
Si, dans le cadre de l’accord du 14 janvier 2015 qui a été conclu entre le Gouvernement et l'UEL, les employeurs ont consenti à approuver la réforme du congé parental ainsi que les autres réformes initiées par le Gouvernement en matière de congé pour raisons familiales et de congés exceptionnels, la Chambre de Commerce souligne que les employeurs sont toujours dans l’attente de mesures concrètes de la part du Gouvernement pour permettre, en contrepartie, plus de flexibilisation en matière d’organisation du temps de travail afin de neutraliser l’impact des réformes gouvernementales en termes de perte de productivité.
De nouvelles formes de congé parental plus flexibles mais moins de clarté et de lisibilité pour les entreprises et les salariés
La Chambre de Commerce formule dans son avis plusieurs critiques d’ordre général, mais aussi plus techniques à l’égard du projet de loi. Elle regrette en premier lieu que les auteurs n’aient pas profité de la présente réforme pour restructurer les dispositions légales actuelles sur le congé parental et qu’ils se soient limités à modifier les articles existants, les uns après les autres, rendant la structure de l’ensemble du texte assez peu intelligible pour les entreprises et les salariés. Aussi, la Chambre de Commerce demande-t-elle qu’une attention particulière soit accordée à la reformulation des dispositions relatives aux nouvelles formes de congé parental flexibilisé dont les conditions d’ouverture dépendent de la situation professionnelle du salarié.
D’autres dispositions du projet de loi portant sur certains points plus spécifiques devraient également être adaptées. Ainsi, les obligations d’information auxquelles est soumis l’employeur en cas de report du congé parental devraient être limitées au strict nécessaire. Un critère objectif permettant de déterminer le premier et le deuxième congé parental en cas de demande concomitante de congé parental devrait également être déterminé. Les modalités de démission du salarié, lorsque celui-ci ne souhaite plus reprendre son emploi à son retour du congé parental, devraient être assouplies. Enfin, en cas de survenance d’un congé de maternité au cours d’un congé parental, l’employeur et le salarié devraient pouvoir se mettre d’accord sur les aménagements à apporter au congé parental entamé.
Durée de travail hebdomadaire minimum pour avoir droit au congé parental
La Chambre de Commerce n’est pas favorable à l’abaissement du seuil de la durée de travail hebdomadaire minimum pour avoir droit au congé parental (qui est actuellement de 20 heures) à 10 heures et estime qu’il serait plus cohérent de retenir le seuil de 16 heures hebdomadaires déjà applicable en droit du travail et de la sécurité sociale et qui correspond à deux jours de travail.
Congé parental et licenciement
La Chambre de Commerce est en outre d’avis que l’interdiction faite à l’employeur de licencier avec préavis un salarié bénéficiaire d’un congé parental n’est ni conforme à l’accord-cadre européen sur le congé parental du 18 juin 2009, ni objectivement justifiable pour les employeurs et les autres salariés sur le plan du droit du travail. A l’instar des législations belge et française, le droit luxembourgeois devrait en conséquence se limiter à sanctionner le licenciement prononcé suite à la demande ou à la prise d’un congé parental sans remettre en cause le droit légitime de l’employeur de licencier avec préavis un salarié, en congé parental à temps partiel ou fractionné, qui aurait commis une faute pour le temps où il travaille.
Des informations financières insuffisantes
De manière générale, la Chambre de Commerce regrette qu’au vu des nombreux cas de figure possibles et des nouvelles formules de congé parental introduites, les projections financières contenues dans le projet de loi sous avis ne soient que parcellaires et ne permettent pas d’apprécier l’impact financier réel de la réforme du congé parental sur le budget de l’Etat.
La Chambre de Commerce regrette encore que l’estimation financière ne repose que sur deux scénarios seulement à savoir, d’une part, une absence d’augmentation du nombre de bénéficiaires du congé parental, et d’autre part, un accroissement du nombre de bénéficiaires d’un congé parental à temps plein (+10%). Elle déplore que le coût supplémentaire de la réforme ait été évalué par rapport au budget 2016, lequel contenait déjà d’importantes hausses des budgets alloués en anticipation de la future réforme. Le projet de loi ne contient en outre aucune évaluation des futures recettes qui découleront des prélèvements fiscaux et sociaux sur les indemnités de congé parental.
Selon la Chambre de Commerce, une réforme d’une telle ampleur aurait mérité une analyse financière poussée, des hypothèses étayées et des estimations justifiées, ce qui n’est malheureusement pas le cas.
L’évaluation future devra se concentrer sur les aspects budgétaires
Si l’évaluation du nouveau dispositif est d’ores et déjà prévue au bout de quelques années dans l’exposé des motifs du projet de loi, la Chambre de Commerce insiste pour qu’elle se concentre exclusivement sur les aspects budgétaires, c’est-à-dire les coûts du nouveau congé parental, et ne puisse pas déboucher sur un durcissement du système quel que soit le succès plus ou moins réel des nouvelles formes de congé parental.
Le texte intégral de l’avis de la Chambre de Commerce est disponible ici.