Affaires juridiques
Le 16 mai 2017, la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) a rendu son verdict dans l’affaire C682/15, très attendu par la Chambre de Commerce, au même titre que par les juristes et conseillers fiscaux de la Place. Cet arrêt devait en effet se prononcer, notamment, sur la faculté de recours contre le bien-fondé d’une demande d’échange d’information internationale.
Il faut savoir que la procédure d’échange de renseignements sur demande a fait l’objet d’un remaniement important dans la loi du 25 novembre 2014. Si la procédure de recours telle que prévue dans le projet de loi n°6680 était déjà largement insuffisante aux yeux de la Chambre de Commerce en termes de respect des droits de la défense et de respect de la vie privée, le texte final a, à la surprise générale, abouti à la suppression pure et simple de tout recours.
C’est dans ce contexte qu’est née l’«affaire Berlioz ». Pour rappel, dans le cadre de l’examen de la situation fiscale de la société française Cofima, l’administration fiscale française a adressé, en 2014, à l’administration fiscale luxembourgeoise une demande d’informations sur la société mère luxembourgeoise de Cofima, Berlioz. Berlioz a fourni toutes les informations souhaitées à l’exception des noms et adresses de ses associés, du montant et du pourcentage du capital détenu par chacun d’entre eux, jugées non pertinentes par Berlioz.
Suite à ce refus, l’administration fiscale luxembourgeoise a infligé en 2015 une amende administrative de 250 000 euros, à la suite de quoi Berlioz a saisi la justice administrative luxembourgeoise pour faire annuler l’amende et la décision d’injonction.
En première instance, le tribunal administratif de Luxembourg a ramené l’amende à 150 000 euros tout en refusant de vérifier le bien-fondé de la décision d’injonction.
Berlioz a alors saisi en appel la Cour administrative du Luxembourg, considérant que son droit à un recours juridictionnel effectif, tel que garanti par la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, avait été bafoué. La Cour administrative du Luxembourg a à son tour saisi la CJUE pour déterminer notamment si elle pouvait examiner le bien-fondé de la décision d’injonction et la régularité de la demande d’information. Un des enjeux de la question préjudicielle était de savoir si la Charte des droits fondamentaux était bien applicable.
L’avocat général, dans ses conclusions de janvier, avait laissé entrevoir une issue favorable en précisant qu’il revenait aux autorités luxembourgeoises de vérifier la légalité de la décision d’injonction, sur base d’une manifeste inadéquation entre la demande d’information et la finalité fiscale poursuivie. Dans la mesure où la demande d’information se fonde sur la directive 2011/16/UE relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal, les autorités ayant mis en œuvre un acte de l’Union européenne, la Charte des droits fondamentaux leur est applicable, et particulièrement son article 47 prévoyant le droit à un recours juridictionnel effectif.
Ses conclusions ont été largement reprises dans l’arrêt de la CJUE du 16 mai.
Bien que tous les signaux étaient réunis avant l’adoption de la loi, il aura ainsi fallu attendre la fin d’un processus judiciaire mené jusqu’au plus haut niveau, afin d’aboutir, in fine, à devoir remédier à la situation. La Chambre de Commerce espère que les modifications législatives seront adoptées à brève échéance pour des raisons de sécurité juridique évidentes, et afin de contribuer ainsi en faveur du droit des affaires.
Les pistes qu’elle avait émises dans son avis n°4242 du 16 juin 2014 restent à cet égard entièrement pertinentes.