Volet no.1 : Entraves aux échanges du fonctionnement du marché intérieur: est-ce que mon entreprise est concernée?

« Entrepreneurs, parlons d’Europe! »

L’Enterprise Europe Network de la Chambre de Commerce du Grand-Duché de Luxembourg et la Représentation de la Commission européenne au Luxembourg ont invité vendredi dernier les entreprises luxembourgeoises à une rencontre sous forme de petit-déjeuner et qui a porté sur les entraves aux échanges du fonctionnement du marché intérieur et les différents instruments à disposition des entreprises pour y recourir en cas de besoin.

Pour ouvrir la base de discussion, Mme Raluca Trasca, keynote speaker de cette rencontre et Policy Officer de l’Unité « Application du droit de l’UE » du Secrétariat Général de la Commission européenne, a d’abord tenu à rappeler que si des entraves aux échanges du fonctionnement du marché intérieur existent, ceci n’est pas forcément dû à un manque de législation européenne, mais plutôt à un manque d’application correcte de ladite législation au niveau national. « Cependant, bien que la plupart des obstacles à la libre circulation sont en train d’être levés, la situation stagne voire se dégrade dans certains domaines. C’est pourquoi la Commission européenne est déterminée à contrôler la mise en œuvre des règles du marché unique de l’UE, de sorte que les entreprises puissent profiter pleinement des avantages que leur confère le grand marché unique européen. Néanmoins, faut-il encore que les informations remontent jusqu’aux différents services compétents, y compris la Commission européenne », a poursuivi Mme Raluca Trasca.

Dans ce contexte, elle a rappelé les mesures que la Commission peut prendre si elle détecte des violations du droit de l'UE, ainsi que les différents mécanismes d'information, de contrôle et recours qui existent au niveau européen et national et vers lesquels le public et les entreprises peuvent se tourner si leurs droits conférés par la législation européenne ont été enfreints.

Le public et les entreprises peuvent signaler directement à la Commission européenne des violations du droit de l'UE et déposer une plainte via un formulaire en ligne. 

Une fois introduite, la plainte sera examinée par la Commission qui prendra une décision sous en délais de 12 mois. Les plaignants en seront informés.  La décision donnera lieu soit à une poursuite et donc à l’ouverture d’une procédure d’infraction contre l’État membre défaillant, soit elle décidera de la clôture de la plainte. Une telle décision est prise par exemple, dans le cas où la Commission juge que le litige en question n’est pas du ressort de ses compétences ou quand il s'agit d'un cas individuel d’application incorrecte du droit de l'UE qui ne soulève pas de questions de principe plus larges ou d'intérêt général. En effet, ce type de cas peux être traité de façon satisfaisante par un autre mécanisme plus approprié au niveau de l’UE et/ou au niveau national. Il est également important de noter qu'une procédure d'infraction lancée par la Commission ne permet pas d'accorder une réparation du préjudice. Une demande de réparation du préjudice peut cependant être introduite au niveau national, notamment en faisant recours aux tribunaux nationaux, a précisé Mme Trasca. Par conséquent, il est important que le public et les entreprises soient informés des droits qui leur sont garantis par la législation européenne et aient accès à des mécanismes de recours alternatifs au niveau européen et national. À cet égard, la Commission a mis en place plusieurs plateformes en ligne qui informent le public et les entreprises sur leur droits et les orientent vers les mécanismes de recours les plus appropriés au niveau européen ou national. La législation européenne prévoit des mécanismes de recours pour des secteurs spécifiques; d'autres ont été mis en place par la Commission européenne en étroite collaboration avec les Etat membres.  

Les autres mécanismes de recours peuvent être les centres SOLVIT ou encore les OMBUDSMANS nationaux, représentés lors de la rencontre de vendredi, par respectivement Mme Cindy Bauwens (SOLVIT) et Mme Claudia Monti (Ombudsman, Luxembourg).

Comme l’a souligné Mme Cindy Bauwens de SOLVIT, l’application des règles ou de décisions injustes, ou de formalités administratives discriminatoires, peut entraîner des difficultés si une entreprise souhaite s’installer, travailler ou exercer une activité dans un autre pays de l’UE. « En tant que service neutre, autonome et gratuit, fourni par l’administration nationale de chaque pays de l’UE ainsi qu’en Islande, au Liechtenstein et en Norvège, SOLVIT peut aider les citoyens ou entreprises établis au sein de l’UE, lorsque les droits émanant de la législation européenne du marché intérieur ne sont pas respectés par l’administration publique d’un autre pays de l’UE. Il faut cependant souligner que SOLVIT, constitué d’une équipe de juristes spécialisés dans la matière, ne peut intervenir que pour des problèmes transfrontaliers et si une action en justice n’est pas encore engagée, hormis le cas de l’introduction d’un recours administratif » a expliqué Mme Bauwens.

A titre d’illustration, la représentante de SOLVIT, a donné l’exemple d’une entreprise luxembourgeoise qui souhaite vendre ses produits en Suède, mais se voit être refusée de ce droit au niveau de l’administration suédoise. L’entreprise luxembourgeoise, suite à une première analyse juridique faite par ses propres moyens, se demande alors si elle n’a pas été victime d’une entrave à la libre circulation des biens et services. Dans ce cas de figure, elle peut donc prendre contact avec le centre SOLVIT Luxembourg, a expliqué Mme Bauwens. Suite à l’introduction du dossier, SOLVIT Luxembourg prend alors contact avec le centre SOLVIT en Suède, qui lui examinera le dossier de près et contactera le cas échéant les administrations en cause. Si l’entrave se concrétise au niveau juridique, les deux centres se mettront en contact afin de résoudre le problème. Dans le cas où SOLVIT se voit dans l’impossibilité de résoudre le problème, ceci pour des raisons de non attribution des compétences ou d’une non collaboration de la part des administrations en cause, le dossier va être communiqué au service compétent auprès de la Commission européenne qui lui prendra alors le dossier en vue de résoudre le conflit. Important à souligner ici est que la présentation d’un dossier à SOLVIT ne suspend pas les délais officiels ou administratifs fixés par la législation nationale, a poursuivie Mme Bauwens.

En poursuivant sur cette lancée, Mme Claudia Monti, OMBUDSMAN Luxembourg, a présenté quant à elle le centre de médiation OMBUDSMAN qui lui agit en tant qu’intermédiaire avec les administrations nationales, notamment lorsque la demande concerne le fonctionnement d’une administration étatique, communale ou d’un établissement public relevant de l’Etat ou des communes.

En effet, la médiation constitue une nouvelle technique de résolution des conflits prévue et protégée par la loi pour permettre de régler un conflit de façon plus durable pour maintenir une relation personnelle ou commerciale plus rapide et plus économique, sans pour autant courir le risque de perdre un droit. Le rôle du médiateur en tant que tiers par rapport aux parties est d’aider celles-ci à élaborer par elles-mêmes, en toute connaissance de cause, un accord qui respecte les besoins de chacun des intervenants en se basant sur la technique spéciale de la procédure de médiation. La Médiation est également une technique de communication qui peut aider à rendre plus efficace la prévention de conflits dans l’entreprise. Il est cependant important à noter qu’un médiateur n’est ni un juge, ni un arbitre, et est strictement tenu de respecter la confidentialité du processus de médiation, a expliqué la OMBUDSMAN.

« Cependant, l’OMBUDSMAN ne peut intervenir uniquement dans des cas liés à des problématiques survenues dans le travail avec des administrations publiques nationales. Pour des problèmes survenus avec des agences européennes, les entreprises peuvent avoir recours au médiateur européen », a complété Mme Monti.

Suite aux présentations, la séance s’est poursuivie par une session de Questions/Réponses très animée.

Pour conclure cette première édition « Entrepreneurs, parlons d’Europe », Mme Sabrina Sagramola, a insisté en sa qualité de Gérant de l’Enterprise Europe Network auprès de la Chambre de Commerce du Luxembourg sur l’importance pour la Chambre de Commerce et son Enterprise Europe Network de rester à l’écoute permanente des besoins ressentis par les chefs d’entreprises luxembourgeoises sur le terrain, et en particulier des PME et des micros-entreprises.

En s’appuyant sur un réseau européen fortement répandu dans plus de 67 pays et ses relations étroites avec les différentes instances communautaires, l’Enterprise Europe Network Luxembourg, résultant d’un partenariat stratégique entre la Chambre des Métiers et Luxinnovation et coordonné au niveau national par la Chambre de Commerce, représente au niveau national un « guichet unique européen » auprès duquel les entreprises luxembourgeoises peuvent se tourner si elles souhaitent recevoir des informations, des conseils ou une assistance technique portant sur les thèmes européens des plus complexes et variés.  « Toutes les informations sont disponibles quelques part, encore faut-il, en raison de la complexité qu’engendre le marché unique, les trouver. L’Enterprise Europe Network se charge d’encadrer l’entreprise par rapport à ses préoccupations ainsi qu’à la guider, si nécessaire, envers les bons interlocuteurs pour trouver des réponses concrètes par rapport aux problèmes rencontrés ou besoins manifestés » a-t-elle conclu.

Les prochaines sessions d’information « Entrepreneurs, parlons d’Europe » auront lieu à la Chambre de Commerce fin septembre et le 7 décembre de cette année.