Avis de la Chambre de Commerce
La Chambre de Commerce a publié son avis sur le projet de loi relatif au Pacte logement dit « 2.0 » par lequel le gouvernement entend instaurer un nouveau programme de coopération dans le domaine de la politique nationale du logement entre l’Etat et les communes souhaitant y participer. Si elle partage le constat du projet de loi quant à l’urgence de viser un accroissement significatif de l’offre de logements locatifs subventionnés, la Chambre de Commerce remet en question certaines modalités proposées par les auteurs du projet loi pour atteindre cet objectif et elle exprime explicitement ses réserves par rapport au rôle limité réservé au secteur privé dans le cadre de cette nouvelle politique.
Par ailleurs, elle observe une certaine déconnexion du projet de loi avec les objectifs de la politique d’aménagement du territoire, le texte se caractérisant par l’absence d’une vision territoriale stratégique concernant la localisation des infrastructures d’habitat.
Face au contexte d’une envolée des prix de l’immobilier, le projet de loi n°7648 relatif au Pacte logement dit « 2.0 » a pour principal objectif d’accélérer l’établissement d’un véritable parc locatif immobilier public d’une certaine envergure et il vise à associer les communes en tant que partenaire central de l’Etat dans le développement de l’offre de logements abordables et en main publique.
Par « logements abordables », le projet de loi n°7648 entend les logements à coût modéré dont les promoteurs publics ou l’État, conformément à la loi modifiée du 25 février 1979 concernant l'aide au logement, assurent l’attribution aux locataires ou aux acquéreurs.
Un défi immobilier qui risque d’entraver le développement socio-économique du pays
La Chambre de Commerce reconnaît pleinement que la croissance soutenue des prix immobiliers constitue un défi important pour la cohésion sociale au Grand-Duché. Cette situation risque par ailleurs d’entraver le développement socio-économique du pays dans son ensemble à plus long terme. Face à ce défi, elle considère que les efforts relatifs à l’allègement des procédures d’autorisation en matière d’urbanisme et d’environnement doivent être poursuivis et que l’offre de terrains à bâtir sur le marché doit être accru, des conditions indispensables pour doper le rythme d’achèvement de nouveaux logements privés.
En dehors des dotations financières visant à stimuler une plus grande implication des communes dans la programmation de constructions d’ensembles subventionnés, l’approche du projet de loi prévoit que les plans d’aménagement particulier (PAP) « nouveau quartier » serviront comme instrument futur pour définir des « quotas de logements abordables » et pour procéder à la réservation de surfaces pour la réalisation de ces logements. Afin d’accroître le parc immobilier public, le projet de loi prévoit de plus l’introduction d’un mécanisme de cession légal comme nouveauté majeure : pour un promoteur immobilier, il est ainsi prévu que les fonds réservés aux logements abordables, ou alternativement les logements abordables réalisés, devront être cédés à la commune ou à l’Etat respectivement. La valeur de cession des fonds serait fixée d’après le prix du jour où le PAP est viabilisé, une fixation où le prix de réalisation effectif des travaux de voirie et d’équipements publics serait pris en compte, mais pas la plus-value présumée de ces travaux. La valeur de cession des logements abordables réalisés, quant à elle, serait fixé d’après le prix de réalisation effectif.
Un mécanisme de cession légal potentiellement contre-productif
La Chambre de Commerce estime que le manque de possibilité pour les promoteurs privés de pouvoir réaliser un bénéfice pour la réalisation des logements abordables constitue une modalité qui est surprenante, alors que les professionnels de l’immobilier ont formulé à maintes reprises leur disponibilité pour s’investir dans un modèle de coopération « win-win ». Elle donne également à considérer que l’absence de bénéfice pour la réalisation des logements abordables pourrait, le cas échéant, même contraindre certains acteurs privés à devoir augmenter le prix de vente des autres habitations construites pour le marché privé, une évolution qui serait totalement à rebours de l’objectif poursuivi par les autorités. La Chambre de Commerce souligne par ailleurs que le mécanisme de cession légal semble se caractériser par un manque d’attractivité de la réalisation des logements par rapport à la simple cession des terrains, une configuration qui risque de s’avérer contreproductive pour les autorités dans leur ambition d’accroître significativement la taille du parc immobilier public, compte tenu notamment des capacités très limitées des principaux promoteurs publics.
La Chambre de Commerce insiste ainsi sur la nécessité d’un ajustement en profondeur des modalités du mécanisme de cession légal telles qu’actuellement prévues par le projet de loi, ou bien pour l’introduction d’un mécanisme de compensation. Étant donné que le projet de loi n°7648 renvoie seulement à la notion vague du « logement à coût modéré » qui apparaît dans le chapitre 3 de la loi de 1979 sur les aides au logement, elle se prononce aussi en faveur d’une définition plus claire et précise du « logement abordable », tout en plaidant pour une ouverture plus conséquente du domaine du « logement abordable » aux acteurs privés.
Finalement, la Chambre de Commerce fait également le constat de quelques autres faiblesses du projet de Pacte logement 2.0, qui semble à ses yeux afficher une certaine déconnexion avec les objectifs de la politique d’aménagement du territoire du Grand-Duché. Or, elle estime que l’instrument du « Pacte logement » peut constituer un outil précieux pour aider à canaliser la croissance démographique future aux endroits les plus appropriés du territoire national et pour progresser vers un modèle plus durable en termes de répartition de la population résidente, une occasion stratégique qui n’a cependant pas été saisie par les auteurs du projet de loi.
Le texte intégral de l’avis de la Chambre de Commerce peut être consulté ici.