Une conférence organisée par la Chambre de Commerce en collaboration avec l’Ambassade de Suède
Depuis le 1er juillet, la Suède a la présidence du Conseil de l’Union européenne. Sa tâche majeure sera de coordonner les actions de l’Europe face à la crise. C’est dans ce contexte qu’a eu lieu une conférence sous le thème de la crise financière internationale le lundi 8 juillet organisée par la Chambre de Commerce, conjointement avec l’Ambassade de Suède.
Après une brève allocution d’ouverture, prononcée par Pierre Gramegna, Directeur de la Chambre de Commerce, S.E.Mme Agneta Söderman, Ambassadrice de Suède au Luxembourg a rappelé que la Suède avait déjà connu une importante crise bancaire dans les années 90. Dès lors, même si le pays est également touché par la récession, comme le reste du monde, la Suède dispose tout de même d’une certaine expérience dans la gestion de crises financières. En effet, en 1992, suite à l’éclatement d’une bulle immobilière, le gouvernement suédois avait été contraint de sauver son système bancaire, qui avait connu l’éclatement de cinq des sept banques majeures.
D’après Lars Heikensten, la rapidité de la réponse dans le cas suédois a été essentielle pour sortir de la crise sans trop de dégâts. En effet, à l’exemple du Japon, qui a aussi souffert d’une crise bancaire de grande ampleur dans les années 90 mais qui a attendu trop longtemps pour reconnaître la gravité de la situation et agir en conséquence, un manque de réaction rapide pourrait causer une décennie de marasme économique.
Dans son exposé, Lars Heikensten, membre de la Cour des comptes européenne et ancien gouverneur de la Banque centrale de Suède a ensuite rappelé les mesures qui avaient été prises par le gouvernement suédois à l’époque pour contrer la crise. Après avoir garanti tous les dépôts des banques suédoises, le gouvernement avait injecté de l’argent dans les banques qui semblaient pouvoir s’en sortir tandis qu’il avait délibérément laissé les autres s’effondrer. Par ailleurs, une agence nationale chargée de la supervision bancaire, la « Bank Support Agency », avait également été crée pour aider les banques qui avaient besoin d’être recapitalisées. Enfin, les actifs « toxiques » avaient été repris par des sociétés de gestion d’actifs afin que les banques puissent se recentrer sur leur mission principale qui était l’attribution des crédits. L’ancien gouverneur de la Banque centrale de Suède a aussi relevé la complexité des produits financiers à l’origine de la crise financière et le degré de difficulté de résolution de cette dernière.
Le gouverneur de la Banque Centrale du Luxembourg (BCL), Yves Mersch, a pour sa part dressé un parallèle entre la récession actuelle et la Grande Dépression des années 1930. Selon M. Mersch la prise en compte des leçons tirées des crises financières connues dans le passé s’est exprimée par une réaction agressive des acteurs publics, qui a permis de limiter les effets dévastateurs d’une crise d’envergure mondiale. L’Eurosystème dispose aujourd’hui d’un éventail d’instruments de lutte contre la crise qui va beaucoup plus loin que le simple taux directeur, comprenant des mesures dites « non standard » dont la provision de liquidités et les opérations de « swap ». Le modèle de régulation dominant qui se basait sur l’autorégulation a clairement atteint ses limites avec la crise.
Avant d’aborder les mécanismes permettant de trouver une sortie de la crise, M. Mersch s’est penché sur l’évolution de l’activité économique dans la zone euro et a présenté les projections macroéconomiques récentes de la Banque centrale européenne. Enfin, des recommandations visant à prévenir des futures crises et à mieux contrôler l’impact de futurs chocs sur la stabilité financière et économique ont été discutées. S’appuyant sur les résultats d’expériences de crises historiques, Yves Mersch a souligné que la crise financière globale actuelle allait avoir un impact négatif sur le potentiel de croissance et d’activité économique à long terme du Luxembourg. La crise économique a exposé l’urgence absolue de procéder à des réformes structurelles des marchés de l’emploi et des produits afin d’absorber les effets néfastes de la crise. Dans ce sens, la crise pourrait constituer une opportunité « bienvenue » pour assurer la volonté politique nécessaire pour mener à bien des réformes structurelles et rétablir le potentiel de croissance à long terme. Finalement, la crise doit inciter les autorités de régulation à construire un nouveau cadre de régulation et de supervision au niveau mondial, dotant les autorités de régulation d’outils permettant de contrecarrer des développements dangereux menant à des crises financières, à un stade beaucoup plus précoce.