Start-Up
Lucas Killian & Anthony Ducrocq Fondateurs, ADLK Solutions

Anthony Ducrocq et Lucas Killian, tous deux professionnels de la santé, sont les fondateurs de la marque ADLK Solutions. Ils ont eu l’idée de fabriquer des bornes de gel hydroalcoolique pour pallier l’augmentation de la demande de solutions d’hygiène dans un contexte de crise sanitaire. Après avoir équipé plusieurs lieux publics comme les quais de la CFL et de Luxtram, la Rockhal, Post, la Coque, la Chambre de Commerce ou encore plusieurs hôpitaux et écoles, Anthony et Lucas restent convaincus que des solutions d’hygiène mises à la portée de tous permettront de prévenir la propagation des virus et de lutter contre des épidémies saisonnières.

Vous êtes tous les deux issus du secteur de la santé. Mis à part ce point commun qui a toute son importance dans l’activité de votre société, pourquoi vous êtes associés pour créer ADLK Solutions ?
Anthony Ducrocq : Je suis aide-soignant au Centre Hospitalier de Luxembourg (CHL) et je partage mon temps entre le service de stérilisation et les urgences. Auparavant, je travaillais en tant que soignant à domicile. Pendant l’hiver 2018, j’ai pris le train à Bereldange. Dans ce train, un homme était malade et toussait fortement à quelques centimètres seulement de mon visage. En descendant à quai, je me suis dit qu’il serait bien de pouvoir me laver les mains. L’hygiène des mains est un réflexe naturel, dans mon travail. J’en ai parlé à Lucas et nous avons gardé cette idée en tête…pas très longtemps, jusque début 2020, quand l’épidémie du coronavirus s’est propagée dans le monde ! Entre février et juillet 2020, Lucas et moi avons travaillé sur un projet de création d’entreprise. Je suis dans la convention hospitalière et mon employeur devait me donner une autorisation du service de la Direction des Soins du CHL pour me permettre de mener à bien ce projet. J’ai obtenu cette autorisation et dès août 2020, nous avons lancé ADLK Solutions.
Lucas Killian : Je suis, quant à moi, comptable auprès de TMH Corporation, une société de distribution de produits d’hygiène des mains pour les professionnels, fondée en 1991, avec des unités de production à l’international, notamment en Tchéquie et au Burkina Faso. Je connais Anthony depuis l’âge de quatre ans. Nous sommes une dizaine d’amis d’enfance et nous avons grandi ensemble, de l’autre côté de la frontière, en France. Malgré le temps qui passe et les différents chemins empruntés, nous continuons à nous fréquenter. Nous avons forgé une amitié solide, et gardé des liens très forts.

Pouvez-vous nous décrire votre produit en quelques mots ?
A. D. : Nous distribuons des distributeurs de gel hydroalcoolique personnalisés, pour une utilisation à l’intérieur, comme à l’extérieur.

Qu’est-ce qui fait la force de vos produits ?
A. D. : Nos distributeurs de désinfectant sont mécaniques et très robustes, et comportent des bacs récupérateurs de gel. Ils sont prévus pour une utilisation destinée au grand public et s’installent  dans l'espace public et dans les rues les plus fréquentées. Les bornes pèsent 22 kilos. Elles peuvent être déposées ou fixées au sol grâce aux pattes de fixation. Le gel désinfectant est obtenu en actionnant une pédale. Nos distributeurs sont aux normes PMR (Personnes à Mobilité Réduite) et proposent également une poignée adaptée à toutes les personnes handicapées, les personnes ayant des incapacités motrices et les personnes en fauteuils roulants. L’ensemble de nos distributeurs sont produits en Grande Région. Ils sont personnalisables et livrés aux couleurs de l’entreprise. L’habillage est finalisé au Luxembourg : des adhésifs personnalisés sont découpés sur mesure et collés sur les distributeurs.
L. K. : Nos distributeurs sont équipés d’un capteur permettant de suivre en temps réel la consommation de gel hydroalcoolique afin d’en gérer le réapprovisionnement, grâce à une application smartphone. Ce concept novateur permet d’anticiper une rupture de gel.

Quels sont les ingrédients de votre réussite ? Pensez-vous avoir été plus rapides que d’autres ?
L. K. : Je ne pense pas que la rapidité seule, ait été un facteur de succès. Dès le début, nous avons visé le grand public avec des distributeurs robustes et visibles, placés dans des lieux de passage. Nous nous sommes adressés à la Chambre de Commerce et nous lui avons livré deux bornes de gel hydroalcoolique aux couleurs de l’institution, que nous avons laissées gratuitement en démonstration à l’extérieur. Quelques jours plus tard, le service Immeuble de la Chambre de Commerce nous a recontactés pour les acheter.
A. D. : Nous avons réitéré l’expérience avec la Société nationale des chemins de fer luxembourgeois (CFL). Nous nous sommes rendus sur le quai de la gare de Luxembourg un dimanche. Il y avait deux distributeurs en plastique blanc qui étaient cassés et du gel coulait partout. Nous avons déposé sur le quai principal un distributeur rouge, personnalisé avec le logo de la CFL. Un numéro d’appel, un QR code ou l’adresse de notre site figurent sur toutes nos bornes. Quelques jours plus tard, nous avons reçu un appel pour une commande de distributeurs à installer dans toutes les gares du pays. Aujourd’hui, quelque 70.000 personnes par jour utilisent nos distributeurs dans les lieux publics au Luxembourg. Nous comptons une vingtaine de gros clients et nous avons une centaine de clients plus petits. En un an, nous avons vendu entre 500 et 1.000 distributeurs en France et au Luxembourg.

Les distributeurs se trouvant pour la plupart dans les lieux publics, avez-vous été confrontés à des actes de vandalisme ? Dans ce cas, comment réagissez-vous ?
L. K. : Nos bornes sont en acier thermolaqué et prévues pour résister à la corrosion. Elles sont garanties un an. Le système est mécanique, extrêmement solide et nécessite peu d'entretien. Nous avons rencontré quelques problèmes lors de la Schueberfouer, la plus grande fête foraine du Luxembourg et de la Grande-Région. Nous avions placé huit distributeurs sur le site de la foire. Quelques personnes qui avaient un peu trop fait la fête ont cassé une ou deux bornes, mais rien de très grave. C’est du petit matériel que nous pouvons nous procurer facilement. Nous nous sommes déplacés et nous avons réparé les deux distributeurs rapidement et gratuitement.

Quel est votre business model et devez-vous faire face à une forte concurrence ?
A. D. : La première source de notre chiffre d’affaires se fait sur l’acquisition des bornes et la seconde, sur le réassort du gel hydroalcoolique vendu par bidon de 5 litres. Une borne personnalisée, livrée et installée coûte 399 euros et la recharge de gel revient à 29,90 euros, soit 5,98 euros le litre. Le bidon de 5 litres a une durée de vie de six mois. Le bouchon est hermétique : une tige descend dans le bidon et empêche le gel de s’évaporer à l’air libre. Nous rencontrons une forte concurrence, mais un gel doit comporter au minimum 70% d’alcool pour être efficace, or 74% des gels en vente sur le marché ne respectent pas ces normes.
Certains gels ne contiennent que 50% d’alcool et de plus, ils sont allergènes. Les utilisateurs ne sont pas allergiques au gel hydroalcoolique en tant que tel, mais plutôt aux différents composants ajoutés comme les huiles essentielles, les colorants, les parfums ou tout autre additif. ADLK propose un produit naturel qui respecte toutes les règles d’asepsie, de sécurité et d’écologie.

Quelle est votre stratégie de développement et comment comptez-vous étendre vos activités ?
L. K. : Nous souhaitons développer nos services en matière de réassort automatisé du gel hydroalcoolique. Nous travaillons actuellement avec une société informatique qui développe l’application permettant de signaler et de géolocaliser les bornes presque vides. Grâce à ce système d’alerte, nous disposerons d’une demi-journée pour intervenir et changer le bidon de gel. L’idée est de commercialiser un service complet, depuis la mise en place de la borne jusqu’à la gestion du réapprovisionnement automatisé du gel.
A. D. : Nous sommes partenaires de Esch2022 - Capitale européenne de la Culture et nous avons mis une borne à la disposition de la ville d’Esch. Nous avons également des opportunités de développement à l’international, notamment au Qatar où il s’agit d’équiper les huit stades qui accueilleront les matchs du Mondial 2022. Actuellement, nous sommes référencés sur la plateforme fournisseurs en attendant qu’une décision soit prise à Doha. Le Moyen-Orient reste assez sous-équipé en termes de distributeurs de gel hydroalcoolique.
En parallèle, nous avons entamé des discussions avec Cargolux qui assure des vols cargo réguliers en direction du Qatar. ADLK est aussi référencée sur la plateforme fournisseurs des Jeux olympiques de Paris 2024.  Nous espérons que nos distributeurs seront disposés au coeur du village olympique de Paris 2024.
L. K. : Nous continuons à cibler et prospecter tous les établissements recevant du public. Si l’activité d’ADLK prend de l’ampleur, nous sommes conscients qu’il faudra faire des choix. Pour l’instant, la production et la distribution de nos bornes personnalisées reste avant tout un plaisir et une activité en marge de notre emploi de salarié, même si parfois, il nous faudrait des journées de 36h !

Dans le contexte de l’épidémie de Covid-19, la ruée sur les gels hydroalcooliques a été massive. Avez-vous pensé à l’après Covid-19 ?
L. K. : Avec la crise sanitaire du coronavirus, l'utilisation du gel hydroalcoolique est ancrée dans les habitudes de chacun. Alors qu'il était jusqu'à présent réservé au milieu hospitalier, le gel hydroalcoolique se glisse dans les sacs à main, s'expose devant les magasins, dans les complexes sportifs, sur les quais du tramway ou du train et dans les écoles, mais aussi dans les entreprises afin de protéger les salariés et les visiteurs.
Lorsque l'on sait que 90 % des infections se transmettent par les mains, on comprend l'intérêt d'installer un distributeur de gel hydroalcoolique. Même si le nettoyage des mains au savon et à l'eau est à privilégier, le gel hydroalcoolique demeure la seule solution dans les lieux sans accès à un robinet, pour se protéger et protéger les autres.
A. D. : Le SRAS, la grippe aviaire et la grippe porcine ont précédé la crise du coronavirus. Ces différents épisodes ont montré que tout risque sanitaire peut se transformer rapidement en une pandémie, comme celle que nous traversons aujourd’hui ou comme l’épidémie de la grippe espagnole ou pandémie de grippe A (H1N1), due à une souche particulièrement virulente et contagieuse qui s'est répandue de mars 1918 à juillet 1920. La grippe espagnole a fait 50 millions de morts selon l'Institut Pasteur, et peut-être jusqu'à 100 millions selon certaines réévaluations de 2020 ! Des mesures d’anticipation doivent être prises pour mieux endiguer, contrôler, et résoudre de telles crises. Nous devons tirer les enseignements de la crise sanitaire actuelle.
L. K. : Grippe saisonnière, rhinopharyngite, angine, bronchiolite … les virus de l’hiver sont très contagieux, et le risque d’avoir un taux d’absentéisme élevé pendant cette période, reste d’actualité. Sans prévention, l’activité d’une entreprise peut fortement ralentir. Le précieux liquide virucide a pris une place de premier plan dans les rituels quotidiens. Le Covid a entraîné des changements majeurs dans nos pratiques qui devraient perdurer une fois l’épidémie terminée. Ainsi, se frictionner les mains sans rinçage est devenu un geste automatique. La demande de gel hydroalcoolique va certainement diminuer d’ici quelques mois, mais nous parions que la population va conserver les bonnes habitudes d'hygiène pour prévenir la plupart des risques d'infection.

Quels conseils donneriez-vous à un futur entrepreneur ?
A. D. : Seul le travail paie. C’est un état d’esprit indispensable pour réussir ! Je conseillerais aussi de noter ses idées. Le fait de relire des notes permet de réfléchir, d’enrichir un projet et de le faire mûrir.
L. K. : Au début, un jeune entrepreneur a tendance à « baisser sa culotte » pour obtenir un marché. C’est une erreur. Il faut plutôt convaincre et mettre en avant les avantages et les qualités de son produit et le représenter fièrement.


Plus d'informations: www.adlk-solutions.com

 

TEXTE Marie-Hélène Trouillez - PHOTOS Matthieu Freund-Priacel/ Primatt Photography

Le distributeur mécanique de gel hydroalcoolique d’ADLK est prévu pour une utilisation destinée au grand public et se recharge avec des bidons de 5 litres.
Dès 2020, Anthony Ducrocq et Lucas Killian ont équipé les quais de la CFL et de Luxtram de distributeurs de gel hydroalcoolique pour freiner la propagation du coronavirus.
Dès 2020, Anthony Ducrocq et Lucas Killian ont équipé les quais de la CFL et de Luxtram de distributeurs de gel hydroalcoolique pour freiner la propagation du coronavirus.
Les distributeurs de gel virucide facilitent l'hygiène et sert à prévenir la propagation des virus, des bactéries et des germes.
Les distributeurs de gel virucide facilitent l'hygiène et sert à prévenir la propagation des virus, des bactéries et des germes.
Toutes les bornes répondent aux normes d'accessibilité pour personnes à mobilité réduite, avec une hauteur de poignée comprise entre 90 cm et 1,30 m du sol.
Les stations sont équipées d’un capteur permettant de suivre en temps réel la consommation de gel hydroalcoolique, afin de gérer le réapprovisionnement de gel grâce à une application mobile.
L’hygiène des mains est le moyen le plus sûr, le plus efficace et le moins cher pour limiter la propagation des infections virales.
L’hygiène des mains est le moyen le plus sûr, le plus efficace et le moins cher pour limiter la propagation des infections virales.
Lucas Killian et Anthony Ducrocq espèrent être sélectionnés pour équiper les huit stades qui accueilleront les matchs du Mondial 2022 u Qatar et sont référencés sur la plateforme fournisseurs des Jeux olympiques de Paris 2024 pour tenter d’installer leurs distributeurs au village olympique.