Aménager le territoire dans l’intérêt de tous

Avis de la Chambre de Commerce

Photo : SIP/Jean-Paul Kieffer

La Chambre de Commerce a rendu son avis sur les projets de règlements grand-ducaux qui ont pour objet de rendre obligatoire les plans directeurs sectoriels (PDS) « logement », « paysages », « transports » et « zones d’activités économiques ». Ceux-ci constituent des règlements d’exécution de la loi du 17 avril 2018 concernant l’aménagement du territoire. L’institution salue la démarche, convaincue de la nécessité d’encadrer, au niveau national, les décisions de nature à impacter durablement le pays et ses différentes parties prenantes. Cependant, en analysant plus finement le contenu de chaque projet de plan directeur sectoriel, la Chambre de Commerce fait le constat de quelques faiblesses et d’un certain manque d’ambition, qui pourraient s’avérer préjudiciables au développement territorial du Luxembourg.

Les plans directeurs sectoriels ont pour principal objectif de réserver des surfaces à l’échelle du territoire et de déterminer leur mode d’utilisation en vue de la réalisation future de projets dans le cadre de certaines politiques sectorielles. Ainsi, les plans directeurs sectoriels ont pour mission de planifier l’organisation territoriale du Grand-Duché sur le long terme et dans l’intérêt général de l’ensemble de la population.  Ils créent le cadre auquel les différentes communes du pays doivent se conformer au moment de prendre des décisions concernant les quatre grands champs de l’aménagement du territoire que sont le logement, le développement de zones d’activités économiques, les transports et enfin les paysages. Ils ont donc un impact important, à long terme, sur bien des aspects de la vie des citoyens et des entreprises.

La Chambre de Commerce a toujours plaidé en faveur d’un rôle prépondérant du niveau national par rapport au niveau communal dans la conduite de la politique d’aménagement du territoire du Grand-Duché, notamment dans un souci de cohérence, d'efficacité, d’utilisation rationnelle des ressources naturelles, de protection de l’environnement et, au final, de développement durable. C'est dans cet esprit qu'elle a soutenu les efforts de révision juridique des dernières années. Un de ses principaux regrets concerne néanmoins le fait que le cadre légal actuel ne permet plus à l’Etat de fixer une date limite au terme de laquelle les communes sont tenues d’avoir mis en œuvre les zones superposées des plans directeurs sectoriels. Pour pallier ce manque, la Chambre de Commerce préconise de recourir à des mesures incitatives pour encourager les communes territorialement concernées à rapidement adapter leurs plans d’aménagement général (PAG) au cadre urbanistique arrêté par les plans directeurs sectoriels.

La Chambre de Commerce apprécie en revanche la complémentarité et la convergence des plans logement, transport et zones d’activités, qui semblent vouloir corriger l’asymétrie entre la répartition de l’emploi (notamment concentré à Luxembourg-Ville et dans les communes limitrophes) et celle de la population qui caractérise actuellement la structure spatiale du Grand-Duché, une organisation territoriale déséquilibrée qui semble notamment être une conséquence du développement spatial diffus des dernières décennies et en partie responsable des limites actuelles au niveau de la mobilité. 

Ces considérations générales étant posées, la Chambre de Commerce va plus loin en analysant chaque plan directeur sectoriel.

Plan Directeur Sectoriel « Logement » 

Partant du principe que la forte hausse des prix immobiliers est nocive tant pour la cohésion sociale que pour l’attractivité économique du pays sur le long terme, la Chambre de Commerce suggère de prendre des mesures en faveur d’une augmentation notable de l’offre de logements : alléger les procédures d’autorisation en matière d’urbanisme, élargir les zones destinées à la construction de logements et surtout mieux mobiliser les terrains déjà réglementairement assignés à l’habitat.

En termes de répartition sur le territoire des zones prioritaires d’habitation futures, la Chambre de Commerce salue la volonté manifeste de vouloir renforcer la centralité résidentielle des noyaux urbains existants comme Esch-sur-Alzette ou la Nordstad. Autre point positif : la grande majorité des nouvelles zones d’habitation arrêtées se trouve dans des zones déjà bien desservies par les transports publics.

Le point d’achoppement de ce plan directeur logement est que l’importance de la surface réservée paraît insuffisante. 20.360 nouveaux logements sont programmés sur 481 hectares, ce qui semble bien modeste au regard du rythme actuel d’accroissement de la population résidente, qui est de l’ordre de 10.000 à 12.000 nouveaux habitants par an.

Plan Directeur Sectoriel « Zones d’activités économiques »

Le développement de nouvelles zones d’activités économiques est indispensable pour permettre à de nouvelles entreprises de se créer ou de s’installer sur le sol luxembourgeois et pour contribuer à la diversification de l’économie et à l’éclosion de nouvelles activités industrielles, porteuses d’innovation. Aux yeux de la Chambre de Commerce, le développement de telles zones permet également de mieux maîtriser la répartition géographique des emplois, dans un souci d’organisation et d’aménagement harmonieux du territoire et de développement durable.

Si les nouveaux projets semblent situés de façon optimale à proximité des centres urbains et des axes de transport, y compris autoroutiers, la somme des nouvelles surfaces réservées aux zones d’activités a été revue à la baisse par rapport au projet de plan directeur sectoriel « zones d’activités économiques » publié en 2014, et cela semble inapproprié par rapport à la demande pour ce type d’équipements.

Plan Directeur Sectoriel « Transports »

Le transport est également un facteur de développement crucial pour le Luxembourg puisqu’il touche à la fois les échanges de marchandises et la mobilité des personnes. Le mode de développement territorial actuel, qui se caractérise notamment par le fait que la répartition de l’emploi salarié (notamment concentré dans le canton de Luxembourg) soit en contradiction avec celle de la croissance de la population (ayant surtout lieu dans le milieu rural) mène pour le moment à un engorgement des infrastructures de transport et des axes routiers dont certains sont arrivés à saturation. De ce point de vue, la Chambre de Commerce approuve globalement la répartition géographique des projets d’infrastructures et le souci de développer la multimodalité, avec un accent mis sur les pistes cyclables et sur les parkings P+R.

Cependant, elle invite le gouvernement à optimiser le réseau de transport en commun au-delà du territoire national, notamment entre les pôles d’habitat des frontaliers et les zones d’emploi au Luxembourg.

Concernant la logistique, le plan directeur transports apparaît insuffisant au regard des ambitions affichées pour ce secteur.

Plan Directeur Sectoriel « Paysages »

Si les paysages revêtent une importance capitale pour maintenir, voire développer l’attractivité touristique du pays, tout en étant un facteur de bien-être évident pour les résidents et une composante essentielle de la préservation de la nature, la Chambre de Commerce met en garde contre une tendance à la surrèglementation, conduisant à une bureaucratie lourde, une complexification des démarches administratives et une inflation de textes réglementaires trop contraignants.

La Chambre de Commerce s’interroge sur la pertinence de consacrer aux paysages un plan directeur sectoriel séparé, alors même que de nombreux cadres juridiques existent déjà pour organiser la protection de l’environnement, ces différents cadres composant déjà un « mille-feuille » juridique complexe.

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