Fondation IDEA
La question de la fin du salariat (et de l’essor prochain de nouvelles formes de travail) est un « point focal ». Cette croyance (très répandue) est entretenue par des travaux - généralement très cités dans les médias - qui annoncent (le plus souvent sans nuance) que des millions d’emplois sont menacés/vont disparaître à cause de la 3ème/4ème révolution industrielle en cours et du progrès technique, et/ou que les marchés du travail seraient destinés à être « ubérisés », avec à terme une part prépondérante de travailleurs indépendants/freelances/multi-actifs et un net recul du « salariat ». Les développements technologiques en cours réduiraient ainsi à moyen terme la quantité de travail et d’emploi, et l’essor du numérique induirait un « basculement » du travail salarié vers le travail indépendant.
Le parti-pris de cette publication est de rappeler que sur la question du futur du travail, la recherche économique n’a pas d’avis définitif et dit « également » que l’automatisation va davantage « replacer/transformer » les emplois que les « remplacer », que si des tâches seront probablement automatisées, cela ne veut pas dire que des « masses » d’emplois le seront, que globalement le risque de « chômage technologique massif » peut être écarté, que le recours aux plateformes collaboratives est (aussi) une opportunité unique de combattre le travail non-déclaré, et que les études qui concluent qu’entre 30 et 50% des emplois risquent d’être supprimés vont un peu vite en besogne...
S’agissant de la supposée ascension irrésistible des « nouvelles formes d’emploi à la demande », il est soutenu dans la publication qu’on leur accorde dans l’opinion une place sans commune mesure avec leur ampleur (encore) modeste, que les chiffres connus sur les différences de revenus moyens entre salariés et indépendants (en défaveur de ces derniers) indiquent que la perspective du « tous indépendants » pourrait se révéler être en réalité globalement un passeport pour la ruine, que la théorie des organisations permet de considérer que les entreprises en tant qu’organisations sociales et productives ont des raisons « rationnelles et objectives » d’avoir des salariés plutôt que de faire systématiquement appel à des travailleurs indépendants (cf. Partie II), que la « théorie » de la régulation démontre l’importance des institutions pour un développement économique harmonieux (cf. Partie III), et que le passé récent du Luxembourg invite à croire qu’il y aura probablement encore des emplois en grande quantité à pourvoir dans le pays dans le futur (cf. partie IV).
En épilogue, est traitée la question de la protection sociale pour demain (avec un rappel sur l’importance de l’éducation, du maintien d’un environnement concurrentiel, et de ce que l’Etat social (infirmier) doit tenir également un rôle d’Etat investisseur), et fait un exercice d’ « économie fiction » qui consiste à imaginer la protection sociale à mettre en place dans une économie avec des salariés « ubérisés » évincés par des robots et soumis à une grande instabilité professionnelle. Cette éventuelle protection sociale 2.0 supposerait d’après l’auteur le rapprochement des comptes de la sécurité sociale et de l’Etat, la rationalisation des prestations sociales existantes et la création de l’ARU (allocation de référence unique), l’implication des entreprises (fortement automatisées) dans la fourniture de services publics gratuits, la création d’un statut d’actif/entrepreneur proche de celui du titre d’artiste évoqué au Luxembourg en 2013, la reconnaissance fiscale du bénévolat et le lancement d’une banque du temps, etc.
Le Document de travail et le Résumé exécutif sont également disponibles via http://www.fondation-idea.lu/2017/02/27/2301/