D’après le World Cloud Report sur les Services Financiers 2025 du Capgemini Research Institute, publié aujourd’hui, il existe un net clivage entre la façon dont les institutions financières traditionnelles et celles de nouvelle génération [1] envisagent leurs investissements dans les technologies cloud. La plupart des banques et compagnies d’assurance adoptent des solutions cloud avec pour principal objectif d’améliorer leur efficacité opérationnelle (84%), tandis que l’objectif poursuivi par les fintechs et les insurtechs est l’accélération des ventes (62%). En outre, selon le rapport, seulement 12% des institutions financières peuvent être considérées comme « innovantes dans le cloud » [2].
Les institutions financières sont confrontées à un environnement complexe, se heurtant à des difficultés en termes d’efficacité dans la collecte et la gestion des données, des lacunes en matière de cybersécurité, une complexité de la réglementation et des attentes des clients en perpétuelle évolution. Selon le rapport, les banques et les assureurs se tournent de plus en plus vers les solutions cloud pour minimiser ces risques. Dans les rapports annuels des 40 premières banques et compagnies d'assurance à travers le monde, cela se traduit par une augmentation de 26% du vocable employé en lien avec le cloud entre 2020 et 2023.
Des obstacles avant de pouvoir tirer pleinement parti du cloud
Toutefois les entreprises se heurtent à des obstacles avant de pouvoir tirer pleinement parti du cloud : les défis opérationnels continuent d'influencer les décisions stratégiques des directions, ce qui ralentit le rendement des initiatives et investissements en matière de transformation cloud. Moins de 40% des dirigeants se disent très satisfaits des résultats obtenus grâce aux solutions cloud mise en place, notamment en termes de réduction des coûts opérationnels (33%), d'évolutivité (27%), d'innovation (26%), de gestion des données et analyses avancées (24%), ou encore de sécurité et de conformité (21%).
Le rapport souligne que les difficultés sont dues au fait que les institutions financières adoptent une approche de migration vers le cloud « lift-and-shift » [3], une mise à l'échelle rapide qui engendre des coûts plus élevés que prévu, des modèles de tarification compliqués et des pratiques de gouvernance et de gestion inefficaces.
« L'adoption du cloud doit être considérée comme le début d'un processus de transformation qui alimente la croissance à long terme de l'entreprise, plutôt que comme une finalité ou une destination. Ce qui ressort clairement de notre étude, c'est que si les institutions financières considèrent la technologie comme un élément de base, certaines d’entre elles considèrent encore le cloud comme une source d'économies, alors que les innovateurs l'utilisent pour redéfinir leurs opérations, » déclare Ravi Khokhar, responsable mondial du cloud pour les services financiers chez Capgemini. « En adoptant une approche ‘cloud-native’ pour favoriser une culture de l'innovation, les banques et les assureurs seront mieux placés pour proposer de nouveaux produits et services, pénétrer de nouveaux marchés et accroître la satisfaction de leurs clients. Avec l'IA générative arrivant désormais en tête des préoccupations des directions, une fondation technologique basée sur le cloud peut également aider le secteur à maximiser les investissements dans les nouvelles technologies pour un usage à l'échelle. »
Les institutions financières sont confrontées à un paysage opérationnel complexe
Les banques et les assureurs détiennent une multitude de données personnelles, financières et transactionnelles en provenance de leurs clients. Cependant, elles sont confrontées à de nombreux défis pour traiter ces données et les sécuriser. Selon le rapport, la majorité des dirigeants du secteur ont mis en avant trois préoccupations principales :
- Les systèmes existants qui empêchent l'intégration de données en silos (71%)
- La protection des données des clients et la difficulté de préserver la confidentialité (70%)
- La qualité médiocre des données, y compris les informations incorrectes et manquantes (69%)
Avec la réglementation européenne DORA (Digital Operational Resilience Act) sur la résilience opérationnelle numérique devant entrer en vigueur en janvier 2025, et les pressions réglementaires croissantes à travers le monde, les institutions financières seront bientôt confrontées à des exigences de conformité encore plus strictes, en particulier en ce qui concerne l'utilisation accrue des plateformes technologiques et des tiers. La récente décision aux USA du Consumer Financial Protection Bureau sur l'open banking, connue sous le nom de Section 1033 du Dodd-Frank Act [4], renforce l'importance des solutions « cloud-natives » [5] pour fournir l'échelle nécessaire, maintenir le coût de l'échange de données à un niveau bas, et rester en conformité. Les contraintes accrues en matière de données, de sécurité et de réglementation obligeront les entreprises à redoubler d'efforts pour obtenir des informations pertinentes et donner la priorité à l'innovation.
Le rapport souligne en outre que 81% des dirigeants estiment que le manque de technologies appropriées entrave leurs objectifs commerciaux. La plupart des personnes interrogées considèrent que l'intelligence artificielle (81%), l'analyse prédictive (75%) et l'automatisation des processus robotiques (65%) sont essentielles pour soutenir un écosystème cloud. Cependant, les institutions financières traditionnelles n'ont pas la maturité et les compétences nécessaires pour ces technologies : que 15% font preuve de maturité en matière d'intelligence artificielle, 30% en matière d'analyse prédictive et 22% en matière d'automatisation des processus robotiques.
Le secteur doit encourager une culture axée sur l'innovation et cloud-native
D'après l'étude, 12% des banques et des compagnies d’assurance peuvent être classées dans la catégorie des innovateurs dans le cloud : elles s'appuient sur une vision bien définie du cloud, s'adossant sur des plates-formes évolutives et des écosystèmes matures, pour générer des résultats supérieurs en termes de gains. Cette stratégie porte ses fruits :
- 32% des innovateurs dépassent les objectifs de vente croisée, contre 12% de leurs homologues
- 32% dépassent les objectifs de monétisation des données contre 10% pour les autres banques et compagnies d’assurance
- 22% dépassent les objectifs de développement de produits innovants par rapport à 10% des autres institutions financières
Pour accélérer l'efficacité opérationnelle et l'innovation, le rapport suggère que les banques et compagnies d’assurance adoptent une approche axée sur les données et le cloud. Pour ce faire, elles doivent se concentrer sur la création d’applications cloud-native, le renforcement des compétences professionnelles en la matière, l’instauration d’une culture encourageant le partage des idées et des meilleures pratiques, et la démocratisation de l'accès à la technologie pour l’ensemble des équipes.
Notes
[1] Les institutions financières de nouvelle génération désignent les entreprises « digital-native » qui s'appuient sur la technologie pour révolutionner les services financiers, en proposant des solutions innovantes et centrées sur le client dans les domaines de la banque, des paiements et de l'assurance.
[2] Organisations considérées comme « innovantes dans le cloud » : des entreprises qui ont une stratégie bien définie en la matière, soutenue par des plateformes évolutives et des partenariats d'écosystèmes matures, grâce à des capacités technologiques avancées. Elles sont axées sur les données, le cloud et centrées sur le client tout au long de la chaîne de valeur afin de dégager des opportunités de croissance nouvelles et innovantes.
[3] Dans l'approche « lift and shift », l’application et les données associées sont extraites des environnements existants et migrées en l'état vers le cloud, en y apportant peu ou pas de changements.
[4] Consumer Financial Protection Bureau
[5] Les applications « cloud-native » sont développées directement dans le cloud, offrant ainsi aux entreprises davantage d’agilité et de résilience.