Start-Up

Depuis le 22 juin, Agnes Kundel et Luciana Griz proposent du haut de leur camion des combinaisons de saveurs originales provenant de l’agriculture biologique, de la production locale et régionale ou du commerce équitable.Toutes deux passionnées de cuisine, elles ont créé le food truck Sansa, un concept de restauration mobile haut de gamme venu tout droit des États-Unis.

Vous êtes un des rares food trucks dirigés par des femmes au Luxembourg. Ce constat vous étonne-t-il ?
L. G. : « C’est plutôt sympathique d’apporter une touche ‘rose’ à la profession. L’art culinaire est exercé indifféremment par des hommes ou des femmes. En revanche, ce qui est plutôt insolite, c’est d’être au volant d’un camion. Nous sommes là pour montrer que les filles aussi sont capables de le faire !
A. K. : « Nous n’avons pas eu besoin de passer le permis poids lourd pour conduire le nôtre. Le permis B suffit ! A priori, je ne pense pas qu’il soit nécessaire d’être bûcheron ou musclé pour conduire un camion (rires).

Pouvez-vous nous raconter votre parcours ?
L. G. : « Je suis brésilienne d’origine et cela fait 14 ans que je suis au Luxembourg. J’ai une formation de biologiste et je travaillais auparavant au Musée d’histoire naturelle. Je suis également fondatrice de l’association ‘Il était une fois…’ qui propose d’accompagner les enfants dans leur découverte de la littérature dans leur langue maternelle, avec des livres écrits dans 18 langues. Mais la gastronomie a toujours été mon rêve. J’ai démissionné pour travailler en restauration et apprendre le métier et j’ai suivi des cours du soir en gastronomie pendant trois ans à Arlon, en Belgique.
A. K. : « Je viens également du Brésil et cela fait 28 ans que je vis au Luxembourg. J’ai toujours travaillé dans la restauration en Allemagne, au sein d’une fédération sportive, et j’avais envie de monter mon affaire. J’ai rencontré Luciana et nous nous sommes tout de suite bien entendues. Nous sommes assez complémentaires et nous nous soutenons mutuellement.

Comment avez-vous planifié votre projet et quelles sont les aides que vous avez reçues ?
L. G. : « Cela fait deux ans que nous nous préparons et que nous réunissons le capital pour acheter notre camion. Trois spécialistes de France et d’Allemagne ont travaillé sur le projet et ont imaginé l’aménagement intérieur du camion, puis le nom et le logo de Sansa, une abréviation de ‘SANdwich et SAlade’. J’ai participé à un séminaire organisé par la Fuse et la Chambre des Métiers intitulé ‘Mon projet de création d’entreprise’ avec des exemples concrets et directement exploitables. Nous avons pu bénéficier du programme Business Mentoring de la Chambre de Commerce et l’aide de notre coach en matière de marketing nous a été très utile. Un deuxième coach va nous être prochainement attribué pour examiner ensemble notre plan d’affaires et nos premiers bilans de comptabilité. En matière de finances, nous avons fourni un apport personnel et nous avons reçu des aides de la SNCI, de la BCEE et d’Etika.
A. K. : « Le plus dur a été de trouver les bonnes informations. Il fallait parfois chercher des semaines. Le concept du food truck est assez récent. Nous ne sommes pas vraiment un restaurant comme les autres et nous avons souvent perdu du temps lors de démarches, car mal dirigées…

Et au quotidien, comment vous organisez-vous ?
L. G. : « Notre dépôt est situé à Holzem, près de Mamer. Les marchandises arrivent à 8 h et nous nous mettons au travail dans le camion pour préparer les repas. Les matières premières sont de haute qualité et la carte change régulièrement, car nous utilisons des produits de saison. Nous travaillons avec des producteurs locaux et régionaux et certains produits sont issus du commerce équitable. Vers 14 h 30, nous commençons à nettoyer. Notre engagement est de limiter au maximum notre impact sur l’environnement. Dans cette optique, nous utilisons des produits de nettoyage écologiques et des emballages biodégradables.
A. K. : « Nous stationnons notre camion chaque jour à un endroit différent et fixe. Nous avons eu recours à la société immobilière Inowai qui décide des emplacements. Nous ne payons rien… nous offrons un peu d’animation dans le quartier où nous nous trouvons. Parfois, on fait appel à nous pour intervenir lors d’événements ponctuels.

Comment envisagez-vous votre avenir ?
L. G. : « La Luxembourg Food Truck Association vient d’être créée. Elle rassemblera les food trucks du Luxembourg qui en compte une dizaine actuellement. Nous allons devenir membres. Nos droits seront mieux défendus, il sera plus facile de négocier les emplacements avec la Ville et nous pourrons faire un roulement entre nous.
A. K. : « Plus tard, nous aimerions avoir une cuisine tout près du dépôt, pour ne pas devoir cuisiner dans le camion. L’espace est tout de même très réduit. Heureusement que nous nous entendons bien (rires) ! Les commentaires sur nos produits sont positifs. C’est une très grande satisfaction pour nous et cela donne envie de continuer. Nous servons aujourd’hui une quarantaine de repas par jour pour un prix moyen de 13 euros pour une boisson, une salade et un dessert. Bientôt il sera possible de commander son repas par téléphone ou via le site.

Auriez-vous un conseil à donner à un jeune entrepreneur qui souhaite se lancer ?
L. G. : « Prendre la décision de se lancer n’est pas toujours facile, mais quand l’envie est plus forte, on peut se permettre d’y croire ! Personnellement, je ne perdrais pas trop de temps avec le plan d’affaires. C’est utile de savoir où l’on va, il faut examiner la faisabilité du projet, bien sûr, mais à un moment donné, il faut cesser d’écrire et se lancer. Au cours de mes formations, j’ai retenu ce conseil : un bon plan d’affaires doit convaincre en 15 minutes. J’adhère totalement !
A. K. : « Je serais ravie d’aider un jeune entrepreneur. Notre expérience pourrait lui permettre d’éviter les écueils. Quand on sait ce que l’on doit faire et à quelle porte frapper, tout est plus facile et les choses peuvent aller beaucoup plus vite ! »

 

Texte : Marie-Hélène Trouillez - Photos : Gaël Lesure