Success stories
L’une des 170 chambres ayant été refaites en 2015, équipée d’un lit de 180 cm de large, comme l’exigent les standards de l’Hotrec pour pouvoir obtenir un niveau 5 étoiles Superior. Le restaurant Amélys (120 couverts). L’hôtel Le Royal di

Philippe Scheffer connaît tout de l’hôtel Le Royal qu’il dirige depuis près de 30 ans. Il y a construit une culture d’entreprise qui repose sur la notion de service et il partage avec son équipe la passion et la fierté du bien recevoir. Il affirme que pour faire ce métier, il faut aimer faire plaisir.

Pouvez-vous nous dresser un rapide historique de l’hôtel ?
Je peux vous résumer l’histoire de l’hôtel en trois dates clé. Son ouverture remonte à 1984. L’hôtel a ensuite connu deux grandes vagues de travaux. En  1997, il y a eu une extension de 40 chambres et l’ouverture du restaurant La Pomme Cannelle, qui a remplacé l’ancien restaurant gastronomique situé au sous-sol. En 2015, nous avons donné le coup d’envoi de grands travaux de mise à niveau technique. Nous avons, par exemple, déplacé la centrale de climatisation du sous-sol vers le toit de l’hôtel et nous avons revu le système de distribution et d’évacuation des eaux. Il s’agissait de travaux absolument nécessaires, mais pas très visibles. C’est pourquoi nous avons décidé de saisir cette occasion pour rénover la plupart des chambres (170 sur 210, ndlr). L’hôtel a donc fonctionné de fin 2014 jusque fin 2015 avec seulement 38 chambres. Nous avons gardé la majorité des employés pendant toute cette période. Nous étions 110 pour 38 chambres ! A l’issue de cette quasi-fermeture, nous avons eu la satisfaction de constater que nos clients nous étaient restés fidèles, contents de retrouver la localisation exceptionnelle de l’hôtel en plein centre-ville et de découvrir le nouveau restaurant Amélys.

Et vous Monsieur Scheffer, quel a été votre parcours ?
J’ai  rejoint l’hôtel Le Royal environ 5 ans après son ouverture. J’ai fait mes études à Lausanne. J’ai d’abord travaillé à Paris, à l’Hôtel du Louvre, en commençant par le bas de l’échelle. Je suis ensuite devenu responsable de la restauration, avant de rejoindre l’Hôtel de Crillon, toujours dans le domaine de la restauration. Au bout de deux à trois ans, je suis devenu responsable administratif mais je me suis rendu compte que j’avais plutôt le goût de l’opérationnel. A ce moment-là, j’ai appris que l’hôtel Le Royal de Luxembourg cherchait un adjoint de Direction. Comme je suis d’origine strasbourgeoise, je ressentais beaucoup d’affinités avec la culture luxembourgeoise et j’ai été très heureux que cette opportunité se concrétise. C’est en 2006 que j’ai pris les fonctions de directeur général.

Quels sont les défis majeurs qui se posent à une entreprise d’hôtellerie haut de gamme comme la vôtre ?
Le premier défi est l’entretien de la notoriété. La conquête du marché est un travail de séduction constant. Pour cela la règle numéro un est d’être à l’écoute des clients.

Le second défi est la maitrise des coûts, dans lesquels les frais de personnel représentent la plus grande part, tout de suite suivis par les achats alimentaires et de boissons. Notre secteur est donc directement et fortement impacté par le système luxembourgeois d’indexation des salaires et la récente augmentation de la TVA sur les boissons alcoolisées, que nous n’avons pas souhaité répercuter entièrement sur nos prix, a contribué à grignoter nos marges.

Enfin, le recrutement de personnel qualifié représente aussi un défi permanent, surtout en restauration. Nous devons aller chercher les candidats de plus en plus loin et surtout être très vigilants car, profitant de la pénurie, certains survendent leurs compétences.  Or un poste vacant ou mal occupé, a des conséquences sur l’ensemble de l’équipe qui doit compenser les manques. Les difficultés de recrutement que nous rencontrons dans la profession sont liées à plusieurs facteurs : les jeunes générations sont très attentives à leur qualité de vie et ne sont pas toujours prêtes à accepter les contraintes horaires de nos métiers ainsi que la journée de travail coupée par la pause entre les services, d’autant que beaucoup habitent loin de leur lieu de travail en raison du coût élevé de l’immobilier au Luxembourg et ne peuvent donc pas rentrer chez eux se reposer. A cela s’ajoute le fait qu’en début de carrière il y a une grande mobilité de jeunes qui veulent multiplier les expériences pour consolider leur CV.  Cela ajoute une difficulté de plus pour fidéliser les bons éléments.

Quelles solutions avez-vous imaginées pour répondre à cette situation ?
Pour les besoins des employés de l’hôtel, nous avons décidé de louer deux appartements en ville pour parer aux urgences. Ils fonctionnent sur le modèle de la colocation, le temps que nos recrues trouvent autre chose. La majorité de nos nouveaux employés sont des jeunes mais il arrive que du personnel expérimenté y fasse un séjour également en l’absence d’autre solution.  Parallèlement, nous réfléchissons à adapter notre organisation pour éviter les coupures entre deux services  mais cela a un coût car cela nécessite d’avoir plus de personnel. Au niveau de la profession nous réfléchissons à des solutions communes pour former davantage de gens au Luxembourg à nos métiers.

Pour répondre à la problématique du logement, une initiative bienvenue serait la création sur le sol luxembourgeois de résidences à loyers modérés, réservées aux jeunes travailleurs, comme il en existe en France par exemple.

Comment le luxe est-il perçu au Luxembourg ?
Les clients sont très exigeants mais ne souhaitent pas un luxe ostentatoire. Ils sont davantage sensibles à la qualité de service qu’au luxe proprement dit. Par exemple, il n’y a pas un très grand engouement pour les suites. Nous avons d’ailleurs profité des travaux pour supprimer l’une d’elles.

Comment les étoiles sont-elles attribuées et comment se maintient-on dans le classement ?
Le Luxembourg vient d’adopter la classification de l’Hotrec, la fédération européenne des hôtels, restaurants, pubs, cafés et établissements similaires. Dans ce système chaque établissement cumule des points en respectant certains critères, qui peuvent se compenser les uns les autres. Chaque niveau correspond en outre à un cahier des charges précis. Le niveau 5 étoiles Superior, que nous venons de décrocher, exige par exemple une certaine largeur pour les lits. Nous avons donc investi dans du nouveau mobilier pour pouvoir prétendre au niveau que nous souhaitions atteindre.

Vous faites partie du réseau The leading hotels of the world. Quels sont les avantages de ce label ?
Ce réseau comprend 430 hôtels indépendants. Pour y entrer il faut passer un « examen d’entrée » et pour y rester il faut respecter un certain nombre de  standards, contrôlés par une équipe de clients mystère. Ils vérifient environ 1000 points de services à chaque visite (propreté, bar, spa, restaurant, demandes au concierge...) puis prennent rendez-vous avec la direction pour un compte-rendu.  Les critères Leading hotels intègrent ce qu’ils appellent l’intelligence émotionnelle, qui n’est autre que la capacité du personnel à s’adapter aux demandes et au style du client qu’il a en face de lui. Selon moi, c’est une bonne chose car il faut faire attention à ne pas trop standardiser les comportements sous prétexte de respecter des standards. Il faut avant tout garder de « l’humain » dans l’accueil des clients.

Faire partie du réseau leading hotels permet aussi de bénéficier d’une bonne  logistique de réservation. C’est leur module qui est mis en ligne sur notre site internet, de manière totalement transparente pour l’utilisateur.

Est-il incontournable d’être présent sur les plateformes de réservation en ligne ?
Aujourd’hui, nous ne pouvons pas faire autrement que d’être présents dans l’offre des OTA (On line travel agencies) mais nous souhaiterions qu’il y ait davantage de réglementation dans ce domaine car dans certains cas, nous sommes face à des abus de position dominante. De plus, les sommes payées par les clients sur ces plateformes, ne servent pas l’économie locale.

Comment avez-vous vu évoluer les exigences de la clientèle?
Dans le temps les gens fortunés voyageaient avec leur propre personnel ou souhaitaient que l’on fasse tout à leur place, y compris défaire leur valise. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Le service butler par exemple,  qui consiste à prendre en charge le client dès sa descente d’avion et de satisfaire ses moindres désirs est encore parfois demandé mais c’est devenu rare.

La clientèle est aussi beaucoup plus diverse qu’il y a trente ans. Nous constatons que les attentes vis-à-vis du service hôtelier varient beaucoup en fonction de l’origine géographique des clients.  La capacité d’adaptation fait donc partie de notre métier. 

Quelle est l’implication de cette évolution sur le recrutement et la formation du personnel ?
Nous mettons un accent particulier sur la maîtrise des langues. C’est notre premier poste de formation, juste avant les formations de conformité aux critères Leading hotels of the world. Heureusement le personnel de l’hôtel est issu d’une vingtaine de nationalités différentes, ce qui représente un bon panel de langues parlées.

Nous organisons des cours en interne pour l’anglais et l’allemand.

Que pensez-vous de la volonté d’augmenter le tourisme MICE (Meetings, Incentive, Conferences, Exhibitions / Events) au Luxembourg ?
Le tourisme MICE est une bonne chose en soi mais je pense que l’on se trompe quand on dit qu’il faut développer les capacités hôtelières dans cette optique. Selon moi, cela revient à mettre la charrue avant les bœufs. Il y a 1000 nouvelles chambres en projet au Luxembourg et je pense que c’est trop d’un coup. Une situation de surcapacité ne pourrait avoir qu’un impact négatif sur les prix.

Notre hôtel fait partie intégrante de l’offre MICE du pays. Nous jouons le jeu. Par exemple nous sommes présents au nouveau salon Meet Luxembourg, mais ce n’est pas la cible MICE qui va nous aider à remplir l’hôtel pendant les périodes les plus creuses qui correspondent aux vacances scolaires et aux weekends, à l’inverse de ce que l’on voit dans d’autres pays. Le développement MICE et l’organisation de congrès internationaux à Luxembourg risquent de faire venir du monde au moment où les hôtels sont déjà pleins, car la clientèle d’affaire est déjà très présente. Il faudrait donc davantage promouvoir le tourisme de loisir, les city trip et les séjours de courte durée.

 

Faits et chiffres

  • Surface de l’hôte  : 26 348 m²
  • Nombre de chambres : 200
  • Nombre de suites : 10
  • Nombres de couverts au restaurant Amélys : 120
  • Nombres de couverts au restaurant La Pomme Cannelle : 80
  • Effectif : 195 personnes
  • Part des réservations on line : 23.5% de l’activité.
  • Demande la plus surprenante faite au concierge : un soir, une diplomate a demandé au concierge, vers 22h00, de lui préparer 500 saumons fumés, tranchés à la main, pour le lendemain matin. Chose demandée, chose faite : recherche, commande, réception, tranchage, emballage et livraison dans un avion privé pour le Qatar à 8h00 le lendemain !

www.leroyal.com/fr/nos-hôtels/luxembourg/hotel-royal

 

Texte : Catherine Moisy - Photos : Emmanuel Claude / Focalize